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Lecture d'un chapitre



Lecture du chapitre 3
Nom de l'œuvre : Tales Of Darkness Nom du chapitre : "Je sais qu'il m'adore"
Écrit par Kazumi Chapitre publié le : 11/12/2005 à 16:37
Œuvre lue 41006 fois Dernière édition le : 11/12/2005 à 16:37
La chambre de Vharley était dans un bordel immonde.
Le lit au draps défaits était constellé de miettes et de poils. Des bouteilles vides ou aux trois quart vides s´alignaient sur une table bancale. Une tasse de café gouttait sur le sol avec une régularité de métronome. Les rideaux, qui, pour une obscure raison, avaient été détachés de la fenêtre, étaient roulés en boule comme si Vharley s´était mouché dedans. La plupart des meubles étaient renversés, et les rares qui tenaient encore debout penchaient dangereusement vers le sol. L´endroit empestait la transpiration.
Lysa n´avait pas eu de mal à entrer dans la chambre. Un groupe de brigands avec lesquels elle avait voyagé durant près de cinq mois lui avaient enseigné les techniques élémentaires d´effraction. L´usage de sortilèges de foudre pour faire sauter les serrures, par exemple. Forte de ces techniques, elle avait pu forcer sans problème la porte de la chambre de Vharley.
Lysa essuya discrètement ses mains moites sur sa jupe. Bien qu´elle méprisât Vharley, elle n´était pas particulièrement ravie de fouiller dans ses affaires pour lui piquer une exsphère. Voire plusieurs si nécessaire. Elle ne savait rien des exsphères, mais elle avait appris que les capacités du porteur étaient augmentées au-delà de toute mesure. Lysa pouvait envoyer des sorts puissants, mais elle usait une grande partie de son mana à chaque attaque magique. Elle avait résolument besoin d´une exsphère pour réguler son flot de mana en combat.
Mais être obligée d´en voler une, quand même…
Lysa secoua la tête. Ce n´était pas comme si Vharley était un ami, ou une connaissance, ou encore un gars sympa. Elle n´avait pas à avoir de scrupules. Pas maintenant.
Elle entreprit de chercher dans les armoires, puis dans les commodes, puis dans les tiroirs du bureau, jusqu´au moment où elle dut admettre que le mot « rangement » n´avait aucun sens pour Vharley. Il semblait foutre ses affaires en vrac, un peu partout dans la pièce, ou même sur le balcon. Lysa soupira. Ça n´allait pas lui faciliter la tâche.
À tout hasard, elle pénétra dans la salle de bain. Là encore, la pièce avait été retournée sans dessus dessous. Les serviettes, maculées de taches, étaient éparpillées à travers la salle de bain. Une bouteille de savon ouverte répandait son contenu sur le sol carrelé. Il régnait une chaleur étouffante. Et pour cause : un mince filet d´eau chaude coulait dans la baignoire, laquelle était bouchée au moyen d´un disque de cire. Elle était à moitié pleine. Des volutes de vapeurs montaient de l´eau bouillante. Par réflexe, Lysa coupa l´eau. Elle n´osa pas plonger son bras dans l´eau pour àter le disque de cire. La jeune fille jeta un coup d´œil circulaire sur les lieux. Bof. Peu de chance de trouver quoi que ce soit ici. Elle allait retourner dans la chambre lorsqu´un éclat métallique, au niveau du lavabo, attira son regard. Lysa s´approcha du lavabo et s´empara de l´objet posé sur le rebord. Ce n´était pas une exsphère, mais un anneau brillant, visiblement doré à la feuille et porteur de propriétés magiques : de fines étincelles bleuâtres couraient le long du cercle métallique. Elle le tourna entre ses doigts et son regard s´éclaira. Un serti-clé ! Cet objet était indispensable pour l´utilisation d´exsphère. Il permettait de contràler les pouvoirs engendrés par l´exsphère, de réguler le mana du porteur et d´éviter les séquelles dues à l´augmentation brutale de la puissance magique. Satisfaite, Lysa glissa le serti-clé dans la poche de sa cape et retourna dans la chambre.
Elle s´apprêtait à reprendre ses recherches, lorsqu´un bruit de pas lourd se fit entendre. Inquiète, Lysa entrebâilla la porte de la chambre et jeta un coup d´œil dans le couloir. Elle blêmit. Vharley ! Il avait l´air complètement bourré, mais elle supposât qu´il était encore assez lucide pour s´interroger sur la présence de la jeune fille dans sa chambre. S´il devinait qu´elle était une Demi-Elfe, elle était foutue. Il ferait probablement le lien avec l´attaque Indignation qui avait détruit la salle de restaurant.
Lysa se tourna vers la fenêtre dont les rideaux avait été arrachés. Elle l´ouvrit et se pencha à l´extérieur. La fenêtre ouvrait sur le jardin privatif de l´hôtel. La hauteur était minime : deux mètres au maximum. Et le sol était recouvert de gazon d´un vert tendre. C´était faisable. En entendant la poignée s´agiter dans un cliquetis métallique, Lysa n´hésita plus. Elle prit appui sur la rambarde et s´élança dans les airs.
La jeune fille atterrit durement sur le sol. Elle eut le réflexe de se rouler en boule pour éviter de se fracasser les os. Elle se releva lentement, décontractant chacun de ses muscles pour vérifier qu´aucun n´avait subi de choc. À première vue, tout allait bien. Lysa vérifia la présence du serti-clé dans sa poche, puis elle se dirigea vers la grille située à droite de l´allée gravillonnée. D´un saut agile, elle franchit la petite porte, et s´avança dans la rue sombre.
Au premier étage, des ronflements puissants se firent entendre. Vharley, succombant à son abus d´alcool, s´était endormi.

Tabatha était occupée à balayer devant la porte d´entrée lorsque Lysa pénétra dans le jardin. Son programme de reconnaissance interne s´activa aussitôt, et elle identifia la visiteuse.
â€" Prénom : Lysa, énonça-t-elle. Nom : inconnu. Type : Demi-Elfe. Cheveux bleus. Yeux vert clair. Un mètre soixante-sept. Gentille et réservée.
Lysa sourit. Bien que l´androïde ait l´air plus vrai que nature, elle trahissait son identité à de menus détails. La plupart des clients d´Altessa étaient souvent surpris lorsqu´ils entendaient ce qu´ils prenaient pour une jeune femme annoncer leur nom, leur profession et leur domicile alors qu´ils ne s´étaient même pas présentés !
La fillette tendit la main à Tabatha, qui la saisit plus qu´elle ne la serra. Un sourire absent se dessina sur ses lèvres. Avec ses grands yeux vides, elle avait l´air d´être perpétuellement en transe. Elle était vêtue d´une robe verte assez courte, et ses cheveux, d´un vert clair, étaient ramenés en une longue tresse qui pendait dans son dos.
Tabatha observa l´enfant d´un air impassible.
â€" Es-tu venue pour voir le maître ? demanda-t-elle de sa voix neutre et polie.
â€" Yep, répondit Lysa d´un ton enjoué. Inutile de le prévenir au sujet de mon arrivée. Il acceptera sûrement de me recevoir. Je sais qu´il m´adore.
Le ton était lourd de sous-entendus, mais Tabatha n´y prit pas garde. En tant qu´androïde, il lui était difficile d´analyser et de comprendre le second degré. Elle s´effaça pour laisser passer Lysa. Celle-ci, sur un bref signe de tête, pénétra dans la demeure d´Altessa.
La maison du Nain était une ancienne caverne aménagée en repaire confortable. Au centre la pièce principale, une table était dressée pour une personne, et tout autour s´alignaient des chaises en bois sombre. À l´intérieur de la chambre d´amis, cinq lits étaient plaqués contre les murs. Lysa se souvenait avoir dormi ici, quelques temps auparavant. Dans un coin de la pièce principale, un réchaud bouillonnait. Lysa huma les aràmes qui montait de la casserole avec délice. Depuis deux jours, elle se nourrissait exclusivement de biscuits et d´eau, ses provisions ayant été volées par un grizzli au début de son périple.
En entendant la porte s´ouvrir derrière elle, la Demi-Elfe se retourna. Altessa lui faisait face, une expression indéchiffrable sur son visage broussailleux. Ses épais sourcils masquaient en partie son regard, mais elle devinait sans peine que le Nain n´était pas particulièrement ravi de la revoir.
â€" Qu´est-ce que tu fais ici ? demanda-t-il d´un ton agressif.
Lysa prit un air outré.
â€" Altessa, très cher, susurra-t-elle d´un ton mielleux. Pourquoi me détestez-vous à ce point ?
Le Nain grogna, puis il marmonna des mots sans suite dans sa barbe. Son animosité, pourtant clairement palpable, ne découragea pas Lysa. Elle s´avança vers lui, un grand sourire aux lèvres et la main tendue. Comme Altessa regardait cette même main en faisant mine de ne pas comprendre, la Demi-Elfe poussa un long soupir. Elle glissa sa main dans la poche de sa cape et en ressortit son serti-clé, puis une bourse gonflée. À la vue des pièces d´or débordant de la bourse en cuir, une lueur de convoitise s´alluma dans le regard du Nain. Il se fit tout de suite plus aimable.
â€" Soyons clair, déclara Lysa d´un ton qui n´avait plus rien de mielleux. Je fais appel à vous, non pas parce que vous êtes le seul Nain que je connaisse, mais parce que vous êtes soi-disant le meilleur de votre profession. En conséquence, si j´estime que votre travail est décevant par rapport à vos véritables capacités, vous dites adieu à votre fric. Est-ce bien clair ?
â€" Parfaitement, répondit Altessa d´une voix blanche. De quoi as-tu besoin ?
â€" Il faudrait me graver un sortilège pour serti-clé. Mais c´est un travail un peu spécial…
â€" Dis toujours.
Lysa se détendit. Le Nain était un vrai professionnel.
â€" Je n´ai pas l´exsphère avec moi, avoua-t-elle. Il faudrait que le sortilège dure suffisamment longtemps, pour que je puisse m´en procurer une et me l´implanter. C´est faisable ?
Altessa caressa sa barbe touffue, puis il hocha lentement la tête.
â€" Il faut d´abord que je voie le serti-clé.
Lysa jeta la bourse sur la table, et tendit le sert-clé à Altessa. Il s´en empara, puis, plissant les yeux, fit tourner l´objet entre ses doigts boudinés. Il l´approcha de son visage, et, brusquement, son expression changea du tout au tout.
Le Nain releva lentement la tête vers Lysa. Son visage était ravagé par les tics. Lysa fut frappée par son expression tendue. On pouvait voir de la peur dans ses yeux gris.
« On dirait qu´il a pris dix ans en l´espace de cinq secondes, songea-t-elle. Qu´est-ce qu´il lui arrive ? »
Blême, les mains tremblantes, il demanda à la jeune fille où s´était-elle procuré cet objet. Lysa hésita. Altessa ne tenait pas les Demi-Elfes en très haute estime, et il pouvait fort bien la vendre à Vharley si elle révélait la façon dont elle s´était procuré le serti-clé.
â€" C´est un cadeau, répondit-elle, mal à l´aise.
â€" De la part de qui ? demanda Altessa d´une voix nerveuse.
Lysa rougit. Elle ne savait pas mentir, et elle devinait dans le regard du Nain que celui-ci flairait la supercherie.
â€" Un petit ami, dit-elle d´un ton évasif.
Altessa ricana, méprisant.
â€" Tu fricotes avec les Anges, toi ?
â€" Hein ?
Lysa se raidit. Un frisson désagréable lui parcourut l´épine dorsale. Pourquoi ce vieux fou parlait-il d´Anges ?
Le Nain soupira longuement, et reposa le serti-clé sur la table. Il passa une main lasse dans le peu de cheveux qui lui restait sur le crâne.
â€" Ton truc, reprit-il, c´est pas un serti-clé.
â€" Que voulez-vous que ce soit ? répliqua Lysa, sceptique.
â€" Un serti-rune.
â€" Et qu´est-ce que ça change ?
Altessa lui jeta un regard dégoûté. Elle ne savait vraiment rien à rien, celle-là !
â€" T´as entendu parler des cristaux du Cruxis ?
â€" Bien sûr, répondit Lysa en songeant à Sélès.
Elle était chargée de garder celui de son demi-frère.
â€" La pose de cristaux du Cruxis entraîne des séquelles sur le porteur, expliqua Altessa. En agissant comme un parasite, le cristal… détruit ses sentiments, si je puis dire. Le porteur perd la sensation de faim, de fatigue, voire carrément la voix. Et il se change petit à petit en une enveloppe vide.
â€" Pourquoi ?
â€" C´est pas la question. Le cristal du Cruxis entraîne aussi des maladies ou des infections parasitaires, qui peuvent être mortelles. Le serti-rune permet d´enrayer ces maladies.
Lysa garda le silence pendant plusieurs secondes. Elle s´aperçut qu´elle avait la bouche sèche.
â€" C´est du délire, souffla-t-elle.
Altessa lui jeta un regard furieux.
â€" Vas-y, traite-moi de fou, je ne…
â€" La ferme, murmura Lysa à voix basse.
Altessa en resta bouche bée.
Lysa sentit un léger frisson lui courir le long du dos comme une araignée qui s´amuserait à remonter sa colonne vertébrale. Elle avait mis le doigt sur un truc énorme. Elle se sentait dépassée. Serti-rune ? Cristaux du Cruxis ? Et pourquoi pas un troupeau d´Anges parlant boutique avec Altessa au café du coin, pendant qu´on y était ?
Lysa secoua la tête. Il était fort probable que le vieux Nain perde un peu les pédales. Aucune raison de s´en faire pour si peu. Si elle jouait le jeu d´Altessa, elle pourrait régler le contrat sans problème.
Lysa haussa les épaules et fit la moue.
â€" Et alors ? dit-elle. Ça ne vous empêche pas de graver le sortilège, non ?
â€" Quoi ?
â€" Vous pouvez graver le sortilège. Je mettrais une exsphère normale, et c´est tout. Pas de quoi stresser…
Lysa sentait qu´en faisant semblant d´adhérer eu délire d´Altessa, celui-ci accepterait de lui graver son serti-clé. Elle vit qu´elle gagnait du terrain lorsque l´expression indignée du Nain passa au regard maussade. Il était sur le point de céder.
â€" Donc, reprit-elle, vous pourriez le faire, non ?
Altessa eut un haussement d´épaules désinvolte.
â€" Ouais, ça devrait être possible.
Lysa eut un sourire satisfait. Finalement, elle n´avait pas parcouru plus de 150 kilomètres dans des conditions franchement merdiques pour rien. Elle s´apprêtait à repartir après avoir fixé les modalités de paiement, lorsque, brusquement, son regard se fit soupçonneux :
â€" Dites, ça existe vraiment, les sertis-rune ?
Si Lysa n´avait pas prononcé cette phrase, tout du moins pas sur ce ton inquisiteur, elle aurait peut-être pu conclure le contrat avec Altessa. Au lieu de quoi, les prunelles d´Altessa s´étrécirent, et elle sut qu´elle avait touché une corde sensible. Le Nain entra dans une rage folle. Son poing s´écrasa sur la table, en plein sur l´assiette en porcelaine qui éclata sous le choc. Il pointa un doigt vers la porte et frappa violement du pied sur le sol.
â€" Tu me prends pour un dingue ?! hurla-t-il, se dressant sur la pointe de ses grands pieds. Je te propose mes services, j´accepte de graver un serti à une putain de Demi-Elfe, et toi, tu refuses de croire ce que je te dis… ?
Il écumait de rage. Lysa avait l´impression de se trouver face-à-face avec un dragon furieux. Elle recula, effrayée.
â€" J´en ai assez bavé avec le Cruxis et sa bande de fous furieux pour ne pas avoir à me taper en plus une morveuse qui s´imagine que je vais prendre des risques rien que pour elle ! Fous-moi le camp !
Lysa le contempla froidement.
â€"Inutile de vous énerver, lâcha-t-elle, très calme.
Altessa rugit littéralement, libérant un flot de postillons qui s´écrasèrent sur le sol.
â€" FOUS-MOI LE CAMP !
Lysa s´empara rapidement du sac de Flouz posé sur la table, récupéra son serti-clé et quitta la demeure du Nain le plus dignement possible, malgré les hurlements démentiels d´Altessa qui l´engageaient à foutre le camp et plus vite que ça. La porte fut violement claquée derrière elle. Elle se retrouva dehors avec Tabatha, qui, atone, continuait à balayer d´un mouvement régulier.
Sur le palier, la jeune fille songea un bref instant à attendre dehors que la colère du Nain soit passée. Elle pourrait lui demander des renseignements lorsqu´il se serait calmé…
Lysa finit par rejeter cette idée. C´était perdu d´avance. Si elle se montrait trop pressante, Altessa n´hésiterait pas une seule seconde à la dénoncer aux chevaliers pontificaux pour harcèlement moral.
Elle salua Tabatha, et, d´un pas rapide, quitta la propriété d´Altessa.

Ozette. Un bled sympa, quand on y pense. Un coin de verdure perdu au milieu des montagnes, avec des chaumières enveloppées par le lierre, des arbres grands comme des cathédrales, et des potagers où paressaient d´énormes citrouilles. Gros potentiel touristique, mais… Inexploité. Les voyageurs ne s´arrêtaient que brièvement à Ozette. Et pour cause : les habitants étaient de parfaits connards. Ils étaient mal aimables, stupides, bornés et racistes. La discrimination envers les Demi-Elfes était si fort dans le village que celui-ci en perdait sa réputation de coin tranquille. Les regards pesants des habitants se posaient sur chaque voyageur qui entrait dans le village, jaugeant, étudiant, analysant le moindre détail de leur physique. Quiconque avait le malheur d´avoir les oreilles un peu trop pointues ou les cheveux d´une couleur étrange â€"signes caractéristiques des Demi-Elfesâ€" se voyait impitoyablement refoulé. En l´espace d´à peine dix ans, Ozette et ses habitants avaient été définitivement exclus de la vie sociale de Tesséha´lla.
« Bien fait pour leur gueule ! » pensa méchamment Lysa en entrant dans l´auberge.
Sa capuche dissimulait ses cheveux turquoise, et ses yeux disparaissaient derrière d´énormes lunettes noires achetées récemment à Altamira. Normalement, on devrait lui foutre la paix. De toute manière, elle ne comptait pas rester longtemps : une nuit, pas plus, le temps de faire le point et de récupérer de son voyage épuisant. Elle était vêtue d´une tenue discrète, mais elle avait décidé de garder ses lames de coude accrochées à son sac, bien en vue, pour décourager les éventuels questionneurs.
Lysa s´appuya contre le comptoir de l´auberge. Visiblement, le ou la propriétaire n´était pas là. Elle s´écroula dans une chaise en rotin, puis sortit son serti-clé de sa poche. L´anneau brillait d´une lueur rougeâtre, éclairant doucement le visage de la Demi-Elfe. Elle se demanda pourquoi Altessa s´était-il énervé lorsqu´elle lui avait demandé si les sertis-rune existaient vraiment. Après tout, pas de quoi fouetter un Minouz… Son histoire paraissait tellement incroyable. Elle aurait juste voulu savoir où il en avait appris autant. Lysa passa la main sur son menton et fronça les sourcils en se remémorant les paroles du Nain. Pourquoi avait-il parlé du Cruxis ? L´organisation des Anges qui protégeaient le monde était complètement détachée des activités terrestres. Il était tout simplement impossible qu´Altessa ait pu avoir à faire avec des Anges. Lysa en déduit que le vieux n´avait plus toute sa tête. C´était ce qui arrivait aux Nains qui vivaient à la surface. Ils perdaient la boule.
Elle se renversa sur sa chaise et ferma les yeux. Elle voulait une exsphère. À tout prix. Elle était prête à remuer ciel et terre pour en obtenir une. Mais, pour rendre ce petit bidule utilisable, il lui fallait un Nain. Inutile de compter sur Altessa. Elle devait trouver quelqu´un d´autre. La question était : qui ?
Des éclats de voix à l´extérieur de l´auberge attirèrent son attention. En temps normal, elle ne se serait pas déplacée â€"elle se moquait bien des disputes de voisinageâ€" mais là, elle avait reconnu l´une des voix qui beuglait des injures à une autre. Elle frissonna. Il l´avait retrouvée. Lysa s´approcha de la fenêtre et son sang se glaça.
Comme elle l´avait deviné, Vharley était là, la bedaine en avant et les traits crispés par la rage. Elle sentait presque son haleine avinée lui fouetter le visage. Certes, il n´était pas terriblement dangereux. Mais les chevaliers pontificaux qui l´accompagnaient étaient d´une autre trempe.
â€" Laissez-moi entrer ! cria Vharley, visiblement échauffé par l´alcool.
â€" Si vous ne louez pas de chambre, répliqua l´aubergiste, je ne vois pas pourquoi je devrais vous laisser pénétrer dans mon établissement.
â€" Parce que, mon grand, je vous signale qu´il y a une putain de Demi-Elfe dans l´une des putains de chambre de votre putain d´établissement ! Et qu´elle est recherchée par le Pontife pour vol et tentative d´assassinat !
Les habitants rassemblés devant l´auberge murmurèrent d´un air choqué. Visiblement, l´accusation semblait les insulter profondément. Une petite vielle agita sa canne en direction de Vharley.
â€" Comment osez-vous ? lança-t-elle d´une voix aigre. Comment osez-vous nous soupçonner de cacher des Demi-Elfes dans notre village !
â€" Cet endroit est tout ce qu´il y a de plus paisible, continua une autre voix dans la foule. Il n´y aucune chance pour que ces saletés de Demi-Elfes viennent envahir le coin !
â€" Ordre du Pontife ! beugla Vharley. Nous devons passer ce village au peigne fin, alors foutez le camp ou nous serons obligés d´investir les maisons de force !
La foule s´écarta de mauvaise grâce. Le Pontife était certes très respecté à Ozette, mais les habitants semblaient ne pas trop apprécier l´idée qu´une bande de chevaliers pontificaux déchaînés envahissent leur maisons. Ce qui était compréhensible. Les dégâts causés dans le village lors des recherches ne leur seraient probablement pas remboursés.
Les chevaliers pontificaux s´avancèrent parmi les habitants, pointant leur lances en avant pour repousser les gêneurs. Deux d´entre-eux se détachèrent du groupe et se dirigèrent vers l´auberge. Lysa se raidit. Elle recula lentement, et, les yeux toujours rivés sur la poignée qui s´agitait, chercha ses lames de coude en promenant les doigts sur son sac. Elle saisit la plus longue, puis se mit en position de combat. À cet instant précis, la porte s´ouvrit et les chevaliers entrèrent.
Enormes, leurs armures étincelant sous la lueur des bougies, les chevaliers pontificaux avaient vraiment de quoi affoler n´importe quel citoyen de Tesséha´lla. Lysa comprit pourquoi les membres de sa race les redoutaient tant. Ils étaient sans pitié, et, disait-t-on, prenaient un véritable plaisir à torturer les Demi-Elfes qui avaient le malheur de tomber entre leurs mains. C´étaient des fanatiques, des adorateurs de l´Eglise de Martel, persuadés d´agir pour l´intérêt commun. Lysa déglutit péniblement. Mais pourquoi avait-elle enlevé cette foutue capuche ?
Les chevaliers se tournèrent vers elle. Lorsqu´ils virent les cheveux bleus de la jeune fille, ils pointèrent leur lances sur elle et poussèrent un cri de victoire.
â€" Capitaine ! hurla le plus gros des deux. On l´a trouvée !
â€" T´as rien trouvé du tout, connard !
Le temps que les deux chevaliers s´aperçoivent de la présence de la Demi-Elfe, celle-ci avait largement eut le temps de préparer un sort. On ne change pas les bonnes habitudes : elle avait choisi d´utiliser une attaque Indignation.
Une immense épée de foudre apparu au-dessus de la tête des chevaliers et se ficha droit dans le casque qui protégeait leur têtes. Sonnés, ils s´écroulèrent sur le sol. Lysa espéra qu´ils s´étaient évanouis : ils souffriraient moins. La vague d´étincelle foudroyante qui suivait la première partie de l´attaque était particulièrement douloureuse. De plus, leurs armures métalliques étaient probablement conductrices.
Lysa s´empara de son sac, s´échappa par la fenêtre ouverte â€"qui ne tarderait pas à exploserâ€" et courut hors du village, devant Vharley qui ouvrait des yeux de merlan frit, l´air particulièrement stupide. La jeune fille piqua un sprint à travers les arbres et buissons qui marquaient les limites du village. Son cÅ“ur cognait dans sa poitrine mais elle ne prit pas le temps de faire une pause : derrière elle, quelqu´un courait tout aussi vite, et sûrement pas dans le but de s´entraîner pour le marathon de Meltokio.
Après un quart d´heure de course effrénée à travers champs, Lysa s´arrêta brusquement et tenta de reprendre son souffle. Elle regarda autour d´elle. Elle se trouvait au milieu d´un champ de blé dont les épis jaunes bruissaient doucement sous la brise. À première vue, personne. Lysa sortit sa carte de son sac puis la tourna dans tout les sens afin de choisir une destination sans risque. Mizuho, peut-être. Ou les montagnes qui bordaient la Tour du Salut... Personne n´oserait la suivre là-bas.
Elle fit un pas en avant, puis s´arrêta net, les sourcils froncés. Derrière elle, les épis de maïs s´étaient brusquement rabattus dans un grand froissement. Alors qu´elle s´apprêtait à se retourner, elle sentit un choc à l´arrière du crâne.
La dernière chose dont Lysa se souvint par la suite, c´est de s´être sentie partir doucement à la dérive, comme on flotte sur une eau paisible.
Ensuite, plus rien. Le trou complet.
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