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Lecture d'un chapitre



Lecture du chapitre 2
Nom de l'œuvre : L'héritier de la foudre Nom du chapitre : Ch. 1: Errance
Écrit par supersianne Chapitre publié le : 17/2/2006 à 22:04
Œuvre lue 21702 fois Dernière édition le : 19/5/2006 à 21:39
Les vagues se soulevaient avec douceur, s'écrasant dans des gerbes d'écume contre la roche.
Des staris colonisaient la partie émergée d'un gros rocher, et semblaient paresser, montrant au ciel leur cœur de joyau.

Un jeune homme, du haut de la falaise, contemplait ce spectacle, qui se déroulait à quelques dizaines de mètres sous ses pieds. Le vent marin décoiffait ses longs cheveux bruns, retenus par un bandeau aux couleurs arc-en-ciel qui faisait le tour de sa tête, masquant son front.
D'apparence grande et maigre, il supportait sans ciller la chaleur épouvantable du soleil, à son zénith.
Son regard quitta l'étendue d'eau en contrebas pour se diriger vers Carmin-Sur-Mer, un peu plus à l'Ouest. La ville portuaire ne semblait plus très éloignée, à présent.
Il avait enfin atteint son but. Suffirait de survivre encore une semaine... Une petite semaine... Un nouveau départ, une nouvelle vie s'offrirait à lui. Ou plutôt, il allait au moins pouvoir s'engager sur le chemin de ce nouvel espoir.
Ce continent lui était hostile. Le nouveau le serait peut-être également, mais il était toujours possible de rêver.
Peut-être que là-bas, les gens ne le dévisageraient pas dans la rue. Peut-être qu'il trouverait enfin un endroit où se poser, et qu'il ne serait plus obligé de vagabonder. Peut-être qu'on arrêterait de fixer avec mépris sa ceinture nue. Peut-être aussi que s'il parvenait à vivre normalement, son existence actuelle lui manquerait. Peut-être qu'il n'était pas fait pour ce monde, après tout.

Peut-être qu'il serait agréable de sentir l'air lui fouetter le visage s'il se jetait de cette falaise. En s'écrasant sur les rochers, il ferait fuir les staris. Quelques jours plus tard, on trouverait son corps inanimé. On diffuserait un avis pour savoir qui il était. Personne ne le reconnaîtrait, et on l'enterrerait face à la mer, dans une tombe sans nom.
Peut-être, peut-être...
Soupirant avec flegme, le jeune homme s'éloigna de la falaise, fixant ses yeux sur son but, si proche qu'il lui semblait trop beau de pouvoir encore espérer l'atteindre.


-Du travail? Tu veux du travail? Mais mon garçon, tu n'as même pas 18 ans!
Quelques ouvriers se tournèrent avec curiosité vers leur patron. Le chantier avançait, l'immeuble serait bientôt achevé. Mais un coup de main n'était pas de refus, car les délais étaient courts, et chacun, surtout le patron, avait à l'esprit la prime supplémentaire, offerte en cas de réussite avant la date fixée.
-J'ai 18 ans. Je les ai eus voilà presque un an... répondit avec douceur le jeune homme qui demandait du travail.
-Mouais... As-tu des papiers? Une assurance? On n'embauche pas comme ça, tu sais! rétorqua le patron, petit être nerveux, accompagné d'un machoc qui avait interrompu sa besogne pour écouter la conversation.
-Et les pokémons, qui travaillent ici? Cela m'étonnerait qu'ils aient quoique ce soit de ce genre... répliqua le jeune homme d'un ton détaché. Ils ont souscrit une assurance? Ils ont l'âge et la stature nécessaire pour travailler de la sorte?
-Ça n'a rien à voir. affirma le patron en haussant les épaules.
-Je n'en suis pas si sûr. termina son interlocuteur, en tournant des talons.
Les ouvriers reprirent leur boulot dès qu'ils virent la conversation terminée. Ils savaient que le patron voulait à tout prix éviter les combines et les magouilles illégales, même si elles pouvaient rapporter temps et argent, car il ne voulait surtout pas voir sa carrière compromise par un contràle anodin.
Néanmoins, ce tout jeune homme incitait à se poser des questions. Il n'avait pas sa langue dans sa poche, et possédait apparemment un sang-froid inébranlable. Il avait l'air... Étranger. Étranger à ce monde.
Les ouvriers se disaient qu'à la place du patron, ils auraient peut-être embauché ce jeune homme, au noir si cela l'avait exigé. Il était possible que le patron lui-même regrettait son choix.
Quelle importance?
La pause du milieu d'après-midi sonna, et tous ne pensèrent alors plus qu'à souffler un peu.


-Maman, il joue bien le monsieur, hein?
-Oui mon chéri. Mais ne t'approche pas trop.
Une mère et son jeune fils étaient assis sur un banc d'un parc de Carmin-Sur-Mer. En face, le jeune homme au bandeau arc-en-ciel, qui n'avait pas réussi à trouver de travail après avoir demandé à à peu près tous les chantiers de construction, démolition, rénovation, et autres en "tion", en était revenu à son moyen habituel de gagner de quoi vivre: jouer de la guitare.
Allez quoi, un peu de charité publique... pensa t-il, avisant les yeux brillants du gosse en face de lui, qui croquait dans un biscuit au chocolat que venait de lui tendre sa mère.
L'enfant aurait volontiers partagé son goûter avec le jeune homme, mais il craignait la réaction de sa maman, qui n'avait manifestement aucune envie de donner quoi que ce soit au guitariste.
Finalement, ils partirent tous deux, au grand regret du petit, et au grand soulagement de la mère, qui jeta un regard en coin pas particulièrement bienveillant au jeune homme.
Le musicien soupira.
Mais bientôt, le gosse revint en courant. Il s'approcha du guitariste, jeta un coup d'œil derrière lui, et tendit de sa petite main le reste de ses biscuits. Puis, en rougissant un peu, il s'expliqua:
-Tu comprends, monsieur, maman doit pas savoir que je t'ai donné du goûter, sinon elle me gronderait. Je lui ai dit que j'avais oublié mon doudou sur le banc, mais je l'avais caché dans ma poche... expliqua t-il, avec un sourire canaille et fier.
-Merci, petit. Faut toujours aider les autres, je suis content que t'ai compris ça. conclut le jeune homme, en croquant dans un des biscuits.
-Au revoir, monsieur. dit pour sa part l'enfant, avant de détaler.
Pour une fois agréablement surpris par l'humanité, le musicien se mit à jouer une chanson joyeuse, qui attira quelques fouinettes.
Le parc était plutôt joli. Très vert, des arbres bien entretenus, des allées de sable agréables à arpenter. C'était bien pour cela que le jeune homme l'avait choisi.

À la fin de la journée, il avait récolté un peu de nourriture et une centaine de pokédollars. Les gens s'approchaient, l'écoutaient un peu, s'asseyaient parfois quelques minutes sur le banc d'en face. Puis, ils partaient sans rien lui donner ou lui dire, ou parfois en le remerciant, en lui souriant, ou en lui donnant un peu d'argent.
Le guitariste regarda passivement son tribut de la journée. Mouais, j'ai fait mieux. conclut-il en rangeant l'argent dans sa poche, et en entamant un sandwich qu'on lui avait donné.


Un coucher de soleil sur la plage... C'était beau.
Il n'était pas le seul à apprécier. Des personnes passaient parfois. Beaucoup de couples de tout âge, ou de solitaires rêveurs. Lui? Il jouait de la guitare, pour changer. Les vagues l'inspiraient. Après tout, ce serait peut-être grâce à elles qu'il quitterait sa vie actuelle.
-Camarade! Reste pas seul, viens avec nous! cria une voix amicale.
Le musicien se retourna. Une bande de jeunes qui devaient avoir le même âge que lui était installée autour d'un feu, à la limite de la plage, et buvait de la bière. Un cliché sympathique.
-Si vous insistez... répondit le guitariste.
Empoignant son instrument, il s'avança, le sable tiède s'engouffrant dans ses sandales. Ce n'était pas vraiment la chaleur des flammes qui l'attirait, mais plutôt celle, plus humaine, des gens qui y étaient réunis.
Les jeunes se serrèrent un peu, pour laisser de la place au nouvel arrivant. Un silence s'éleva alors quelques secondes, vite rompu par la conversation qui reprit. On tendit une canette au jeune homme, qui ne rechigna pas.
Ils parlèrent de tout, sans lui poser aucune question sur sa vie. Il était là parce qu'on l'avait invité, parce qu'on sentait qu'au fond, il était comme eux. Nul besoin de connaître sa provenance, son âge, ou ce qui l'amenait ici.
-Tu comprends, mec, on est en vacances, nous... Vacances scolaires, attention, hein... On fait des études, nous, pas du pokémon... lâcha un des jeunes en s'adressant au guitariste, sans vraiment de rapport avec le reste des propos. Alors comme on t'a vu tout seul, sans pokémons, on s'est dit que...
Il s'interrompit pour finir sa bière, et s'essuya les lèvres.
-On s'est dit que t'étais comme nous, ouais... Pas besoin d'aller bousiller ta vie en voyage avec des bestiaux que t'esclavagises...
Le néologisme fit sourire l'assemblée.
-C'est clair. On finira pas à 18 ans, perdu, sans rien pouvoir faire de nos vies... renchérit une fille.
-À part s'enràler dans des Teams aux desseins foireux... compléta le musicien.
-T'as tout compris. acheva un autre. Bon, tu nous joues un truc? Tu dois connaître pas mal de choses, vu que t'as l'air d'être un voyageur...
-Ouais. J'ai lâché mes études à 16 ans, parce que mon père est mort, et que comme il avait des dettes par dessus les oreilles, ils ont chopé la baraque et tout ce qu'il y avait dedans pour rembourser. Il me restait rien, à part ma guitare, et deux trois fringues.
-Et tu t'es tiré avant qu'on te colle en pension! proposa quelqu'un.
-Tout à fait. répondit le guitariste. Mais je préfère pas trop parler de moi...
-Désolé. T'aime pas trop la compagnie, non?
-Si si. J'aime tout le monde, de toute façon.
Les regards se tournèrent vers le musicien. Il disait cela sans ironie. Il le pensait. Il avait peut-être raison, peut-être tort. Quelle importance? Il n'avait pas usurpé son bandeau arc-en-ciel.
Le jeune homme prit sa guitare, manquant d'éborgner à coup de manche sa voisine de droite, et commença à jouer, un morceau mélancolique et beau, qui collait tout à fait à l'ambiance feu de camp.
Les gens qui circulaient jetaient un œil sur ce groupe. Mépris de la jeunesse, ou regret de ne plus y appartenir? Ils passaient leur chemin en ralentissant à peine leur allure.
Les compagnons providentiels du musicien écoutaient religieusement ces notes envoûtantes, se disant que cet individu était vraiment un marginal. Qui plus est, il était gaucher.
L'enviaient-ils? Auraient-ils aimé jouer de la guitare mieux que personne, être toujours libres et sans le sous, sans attaches, sans véritable combativité et plein d'amour et de paix?
Et lui, enviait-ils ces jeunes qui vivaient à Carmin-Sur-Mer depuis leur enfance certainement, allaient à la même école, et passaient du bon temps sur la plage pendant les vacances? Peut-être, oui.
Il avait croisé leur route, un soir, ce soir.
Ils ne se reverraient probablement jamais. Il espérait qu'ils n'oublieraient pas ce moment. Mais enfin, ils risquaient probablement de l'oublier, surtout après la gueule de bois qu'ils ne manqueraient pas de se prendre le lendemain matin, avec toute la bière qui semblait circuler...
Bref, quelle importance? Il termina la chanson avec quelques notes en arpège.
-Mon gars, t'assure! déclara un des jeunes, en levant le pouce.
-Ouais, j'aimerais en dire autant de toi... répondit une fille qui semblait être sa copine, avec un ton de désespoir feint.
Cela continua en une sympathique dispute, qui fit rire toute l'assemblée.
-T'as pas une chanson d'amour? demanda une des personnes au guitariste. Histoire de faire original...
-J'ai que ça... assura celui-ci en commençant un nouveau morceau.
Il submergea d'émotion tout le monde. Les accords légers semblaient avoir leur existence propre. Sa voix chaleureuse se muait en une plainte douloureuse à volonté. Les paroles de la chanson, magiques et magnifiques, s'envolaient avec la musique.
Au final, il avait réussi à arracher quelques larmes.
-C'est quoi ça? parvint à articuler une fille, apparemment très touchée.
-C'est de moi... répondit simplement le guitariste, en regardant fixement le feu.
Des regards admiratifs et incrédules se tournèrent vers lui.
La soirée continua.


Au petit matin, le guitariste se réveilla, hagard. Il avait mal à la tête. Trop d'alcool hier soir... conclut-il en se frottant les cheveux.
Il était vautré dans le sable, comme tous les autres jeunes. Le feu était éteint.
Le musicien alla piquer une tête dans la mer froide de l'aube, en ayant pris soin de cacher sa guitare dans un buisson proche. Il revint ensuite, regarda avec un sentiment paternel ces amis d'un soir, et même d'une nuit, tous effondrés, le sourire aux lèvres.
-À la prochaine... murmura t-il en s'éloignant.
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