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Lecture d'un chapitre



Lecture du chapitre 7
Nom de l'œuvre : Chroniques Nom du chapitre : KAO-II-3 Le chercheur, le motard et la ville noble
Écrit par RAIDEMO Chapitre publié le : 29/12/2006 à 14:16
Œuvre lue 21052 fois Dernière édition le : 2/4/2008 à 19:24
Chapitre 3 : Le chercheur, le motard et la ville noble


La Jeep s´arrêta au nouveau feux qui venait de passer au rouge et le grand champion soupira avec lassitude.
« Tu le fais exprès ? demanda Koga d´une voix calme.
- Non mais regarde moi cette ville ! grogna le militaire. Y a des feux tous les deux mètres, comment veux-tu circuler normalement ?
- Si tu te bougeais un peu plus vite au moment où ça passe au vert, peut-être qu´on aurait le temps de griller un ou deux oranges.
- Koga...
- Hum ?
- Ferme-la s´teuplait.
- Ah... vert...
- Ah merde ! »
Les roues crissèrent bruyamment sur le goudron chauffé par le soleil et le véhicule reprit sa course. Le ninja s´enfonça dans son siège et ferma les yeux. Le militaire lui jeta un coup d´œil, puis fixa à nouveau son attention sur la route. Raichu, roulé en boule sur la plage avant, le regardait de ses petits yeux noirs. Il semblait aussi tendu que son dresseur, bien que ce dernier fasse tout son possible pour ne pas paraître anxieux. Il dut s´arrêter une nouvelle fois et en profita pour observer longuement les panneaux qui se dressaient au croisement. Le Manoir Céladon n´était plus très loin. Le champion se sentit soulagé ; Céladopole était une ville immense à la circulation abondante et l´air qui flottait ici était souillé par l´odeur de pots d´échappements des nombreux véhicules. Le militaire n´aimait pas ça. Il n´aimait pas les grandes villes, il n´aimait pas cet air irrespirable, il n´aimait pas tous ces bruits. Dans un endroit comme celui-là, il se sentait aussi à l´étroit que s´il n´avait été enfermé dans une cage. Carmin et sa liberté, l´air pur de l´océan lui manquaient déjà. Le bruit et la fumée qui régnaient ici ne rappelaient en lui que trop de souvenirs douloureux ; les souvenirs de ce qu´avait été sa vie avant qu´il n´entre dans cette arène.
La fanfare de klaxons qui se mit à hurler derrière lui le rappela à la réalité et il se décida enfin à démarrer en grognant sous le mécontentement des autres conducteurs. Raichu, agacé par ce vacarme qui semblait gêner son dresseur autant que lui, sauta sur les genoux de Koga et passa la tête par la fenêtre pour crier des insultes à tous ceux qui se trouvaient derrière eux. La tête d´un Miaouss apparut à la fenêtre passagère de la voiture qui les suivait pour répondre à ses insultes. Le rongeur acheva la conversation par un bras d´honneur à l´intention du félin, et disparut subitement tandis que la vitre remontait.
Koga, que le poids soudain de la souris électrique avait violemment réveillé, l´attrapa par la queue pour le repousser vers son dresseur afin de refermer sa glace en maugréant quelques mots malséants. Raichu se redressa bien vite et sauta sur son perchoir pour ne pas gêner le militaire dans sa conduite. Le champion lui sourit et le rongeur lui répondit par un sourire tout à fait identique, dévoilant ses petites dents blanches dans une attitude de fierté. Le ninja grogna au champion qu´il ferait mieux de regarder la route pour éviter d´écraser la grand-mère au sac de toile violet qui s´engage sur le passage piéton alors que le feux pour véhicule est vert.
La Jeep continua sa route jusqu´au Manoir Céladon, tant bien que mal, et arriva finalement devant l´immense bâtiment aux murs gris vert troués d´innombrables fenêtres. Morgane frappa à la vitre, et Koga lui ouvrit.
« Prends la ruelle de droite, il faut aller à l´arrière du manoir. »
Le militaire hocha la tête en s´engagea dans la petite rue. Ils stoppèrent enfin l´engin derrière le grand bâtiment. Les trois champions et le dresseur étranger, qui n´avait plus émis un son depuis l´incident du ranch et s´était contenté de dormir durant tout le voyage, descendirent de la Jeep et se dirigèrent vers les grandes portes en chêne massif. Ikeda reprit enfin la parole lorsqu´ils furent dans le hall immense qui ne menait nul part ailleurs que vers un large escalier aux marches de marbres. Sa voix était, comme à son habitude, douce et apaisante.
« Quel est le nom de l´homme que nous devons rencontrer ?
- Il s´appelle Daman, lui répondit Morgane.
- Il saura nous aider à mettre la main sur Kao, ajouta fermement Koga pour éviter toute autre question.
- Ah... j´ai la dalle, j´espère qu´il a pensé à nous préparer un petit quelque chose » lâcha à son tour le militaire.
Les trois champions et le dresseur empruntèrent l´escalier. Ils traversèrent plusieurs salles immenses, tapissées de carreaux grisâtres qui formaient le sol et les murs. Ce bâtiment était froid et austère, et sentait l´eau de javel à plein nez.
Ils arrivèrent enfin sur le toit de l´immeuble avec un soupir de soulagement et un remerciement inaudible pour leurs jambes engourdies. Un mur s´étendait sur la moitié du périmètre, séparant la surface aux dallages ternes. De leur côté se trouvait, un peu plus loin, une sorte de petit bâtiment d´acier aux murs presque entièrement vitrés ; il était cependant impossible de discerner ce qui se déroulait derrière ces vitres tant le reflet du soleil y était aveuglant.
Le groupe se dirigea vers la porte entrouverte. Ils s´arrêtèrent en face et Morgane s´apprêta à frapper pour prévenir de leur présence, mais le militaire et son rongeur la devancèrent en s´engouffrant dans la pièce sans dire un mot. Les deux autres champions soufflèrent bruyamment avant de les suivre, Ikeda sur les talons. La différence flagrante qu´offrait aux yeux le parquet de bois ciré laissait croire qu´il s´agissait d´un tout autre bâtiment. La forte lueur du jour emplissait la pièce où se dressaient quelques machines étranges, un grand bureau de métal et des étagères couvertes de dossiers remplis à craquer. Il régnait cependant un climat rafraîchissant en raison de la présence du climatiseur qui émettait un doux ronronnement. Deux visages se tournèrent vers les nouveaux venus, deux visages familiers pour les trois champions.
Le plus jeune des deux hommes semblait tout juste sortir de l´adolescence ; ses cheveux châtains étaient bouclés et attachés en catogan. Ses yeux noisette reflétaient la surprise de voir quatre personnes entrer ainsi dans son laboratoire. Il était petit et semblait peu robuste, il portait un costume beige sur une chemise blanche, accompagné d´une cravate marron et de mocassins lustrés de la même couleur. L´homme qui se tenait à ses côtés paraissait quelque peu plus âgé et était d´une beauté androgyne. Il avait, lui, une carrure forte, mais nullement imposante, et était grand et svelte. Ses longs cheveux bleu clair, détachés, tombaient avec grâce sur le bas de son dos. Ses yeux vairons pouvaient aussi bien mettre mal à l´aise que tranquilliser la personne qu´il fixait ; l´une de ses iris était marron, l´autre bleu mer. Ses vêtements contrastaient étrangement avec ceux du jeune homme qui l´accompagnait ; il était vêtu d´une veste et d´un pantalon en cuir noir sur un débardeur blanc. Ses bottes sombres à crampons n´étaient pas fermées sur le devant et les petits ceinturons servant d´attaches pendaient sur le côté de ses chevilles. Enfin, il portait un anneau en argent à l´oreille droite, identique à celui de Koga de par sa forme.
Ce fut le jeune motard qui rompit le silence en laissant apparaître un sourire agréable à l´intention des visiteurs.
« Tiens, tiens ! Quelle surprise ! Vous êtes là que pour assister à la fête du premier parfum de la princesse ?
- Très heureuse de te revoir Léon... » soupira Morgane.
Le terme de «princesse» désignait bien évidemment la championne locale, qui fêtait ce jour-là l´anniversaire de sa toute première création (toujours très prisé, bien qu´une année entière se soit écoulée).
Le militaire ne put s´empêcher de grogner en croisant les bras, Koga ne dit rien, mais son corps se raidit, et ses cheveux semblèrent se dresser sur sa nuque. A cet instant, le jeune motard du nom de Léon prit un air exagérément étonné en se précipitant vers le grand champion qui avait reculé de quelques pas en manquant de marcher sur Raichu, ignorant à présent le reste du groupe. Et lorsque le motard s´arrêta devant lui, le militaire sembla sur le point de prendre ses jambes à son cou, comme aux prises avec le pire des ennemis concevable.
« Tu es venu toi aussi ? Dire que je ne pensais jamais te revoir ! lança le jeune homme avec un rire amusé.
- Dégage ! Léon ! s´insurgea le colosse.
- Pourquoi tant de distances ? continua le motard d´une voix visiblement déçue. Cela m´attriste énormément...
- Tant mieux !
- Allons, je ne m´en fais pas ! reprit le jeune homme, un nouveau sourire naissant. Je sais bien que tu ne peux pas te passer de moi » insista-t-il.
Morgane hésitait à se mêler de cette dispute ridiculement enfantine lorsque le jeune chercheur aux cheveux bouclés s´avança en soupirant.
« Désolé, je n´ai pas réussi à le chasser avant que vous n´arriviez...
- Daman ! Petit menteur ! Nous étions en pleine conversation ! »
Le garçon au catogan fit signe à Koga, Morgane et Ikeda de venir s´asseoir devant la table en acier qui se dressait au milieu de la pièce, ignorant les deux hommes qui se chamaillaient devant la porte. Ils s´installèrent tous les quatre et la championne prit la parole en première.
« Tout d´abord Daman, je te présente Keiji Ikeda. C´est lui qui a été envoyé pour nous aider sur l´affaire Kao.
- Enchanté, dis le jeune homme en souriant d´un air gêné. Je... vous voulez quelque chose ? Je n´ai pas grand chose mais...
- Rien du tout, lança rapidement Morgane avec un sourire destiné à calmer la tension de Daman, ce garçon si timide.
- Très bien... alors... j´ai fait des recherches sur ce que vous m´avez demandé. Si notre interprétation du message de Kao est exacte, il va se lancer à la recherche d´Artikodin, sûrement pour récupérer son apparence.
- Ça fait un moment qu´on n´a pas entendu parler de ce titan, le coupa Koga. Si bien que certains se demandent s´il est encore en vie.
- Il doit être en vie quelque part, continua Morgane, sinon nous aurions du faire face à quelques dérèglements climatiques visibles sur le continent.
- Peut-être est-il en vie, commença Ikeda, mais cela ne prouve pas qu´il soit éveillé. »
Daman se figea en observant le dresseur. Sans doute avait-il été surpris par son accent, comme chacun d´eux ; après tout, la langue dont il semblait faire usage n´était à ce jour que très peu connue, l´une des nombreuses langues anciennes que certains villages des pays du sud s´échinaient à faire perdurer, et que certains chercheurs apprenaient pour déchiffrer des textes vieux de plusieurs siècles.
Les deux champions fixèrent le dresseur qui parut se rendre compte qu´il avait commis une faute.
« Eveillé ? répéta Morgane. Que voulez-vous dire ? »
Le ninja se raidit encore plus en entendant Ikeda murmurer quelques paroles dans sa langue d´origine avant de reprendre son sourire et de répondre.
« Je voulais dire qu´il est peut-être entré dans une phase de sommeil comme certains scientifiques ont pu l´observer sur quelques légendaires. Un sommeil réparateur à la suite d´un combat peut-être ?
- C´est... c´est tout à fait possible, reprit Daman. Cela pourrait expliquer le fait qu´il ne soit pas apparu depuis plusieurs années.
- Peu importe qu´il soit éveillé ou non, répartit soudain Koga qui semblait à présent plus qu´énervé. Ce qui compte c´est l´endroit où le trouver. Kao ne risque pas de se soucier de la sieste de sa cible !
- C´est vrai, annonça Morgane. Daman, est-ce que tu sais où nous pourrions le trouver ?
- Et bien... normalement, sur les îles Ecume près de Parmanie.
- Personne ne l´y a aperçut depuis longtemps, lâcha froidement le ninja.
- S´il dort effectivement, ce n´est pas une preuve de son absence. »
Koga se renfrogna, et s´enfonça dans son siège en croisant les bras. Il ne participa plus à la discussion des trois autres qui cherchaient maintenant à savoir de quelle façon ils allaient se rendre sur ces îles et comment trouver le titan. Daman leur proposa de rejoindre un cabanon que lui et d´autres chercheurs utilisaient quelques fois pour observer la faune marine et glaciaire de cet endroit. Le ninja ne les écoutait plus. Il se leva sans se soucier des regards qui se posèrent sur lui un court instant, avant de retourner à leur débat. Il se dirigea vers les deux hommes qui s´adonnaient encore à leur jeu de combat verbal. Ils s´arrêtèrent en le voyant approcher.
« Amène-toi ! lança-t-il d´une voix sèche à l´intention du militaire. Il faut que je te parle. »
Le grand champion grogna avant de lui adresser un salut militaire exagéré.
« Bien chef... » maugréa-t-il.
Il adressa finalement un signe amical à Léon avant de se diriger vers la porte. Le ninja s´apprêtait à le suivre lorsqu´il sentit une main le fràler près de l´oreille gauche, et son anneau noir se mit à danser en tintant. Koga recula d´un geste brusque pour faire face à Léon, et lui offrit une grimace de colère. Le motard se contenta de lui sourire d´un air peu sympathique, le même genre de sourire qui apparaissait souvent sur les lèvres du ninja. Le jeune homme ne dit pas un mot, il fit tinter son propre anneau d´argent à la forme identique à celui du ninja. Celui-ci lâcha un Kh ! agacé, puis tourna les talons pour rejoindre le militaire.

Le Major, adossé au muret qui formait les bords du toit, avait la tête baissée. Ses yeux étaient fermés. Raichu, à ses pieds, l´observait d´un air inquiet où se mêlait une pointe de tristesse. Koga sortit du laboratoire, et les paupières de l´homme se soulevèrent. Ses pupilles se posèrent sur lui tandis qu´il s´avançait. Après un bref soupir, le militaire s´empressa de reprendre son sourire habituel, ne dévoilant aucune tension.
« Qu´est-ce qu´il t´as dit ? demanda-t-il d´une voix moqueuse.
- Ça ne te regarde pas, grogna le ninja.
- Ok, ok...
- Qu´a dit Ikeda ? »
Le militaire parut surpris et ouvrit de grands yeux avant de répondre.
« Ikeda ? Il a dit quelque chose ?
- Ne prends pas cet air faussement étonné ! » intima Koga d´une voix forte et piquante.
Raichu fronça les sourcils en entendant le ton que venait de prendre le ninja ; jamais il ne l´avait vu aussi énervé. Son dresseur se contenta de prendre le sourire entendu de celui qui abandonne, et soupira.
« Je sais que tu comprends sa langue, insista Koga d´une voix plus maîtrisée. Et je sais parfaitement que tu n´as pas perdu un mot de la conversation. Qu´a-t-il dit tout bas après avoir parlé du sommeil de l´oiseau ?
- Il n´a fait que marmonner des insultes, dit le grand champion en haussant les épaules.
- Seras-tu étonné si je te dis que je ne te crois pas ?
- Non.
- Dis-moi.
- Il a dit qu´il n´aurait pas du parler de l´Eveil. Son dernier mot avait une consonance bizarre.
- Il nous cache quelque chose, grinça le ninja.
- C´est fort probable... »
Koga ne répondit pas à la dernière remarque du champion. Ses yeux détournés vers le ciel virant à l´orange étaient perdus dans une profonde méditation.

Daman confia la clé du cabanon à la championne et celle-ci le remercia.
« Quand allez-vous partir ?
- Demain, répondit Morgane. Il vaut mieux ne pas perdre de temps.
- Vous savez où dormir cette nuit ?
- Oui, ne t´en fais pas, nous dormirons au Centre.
- Très bien, dit finalement le jeune chercheur en souriant. Je vous contacterais si j´ai du nouveau. Bonne chance à vous. »
Après cette séparation, Morgane s´engagea avec Ikeda dans le grand escalier. Les deux autres champions étaient déjà partis. Ils devaient les attendre devant la Jeep. Tandis qu´ils descendaient les marches, la jeune femme sentit le regard pesant du dresseur sur son dos. Elle tourna finalement la tête vers lui et fut surprise de se retrouver face à un visage de marbre.
« Vous devriez faire attention Morrgania. Vos compagnons ne seront pas toujours les alliés que vous pensez avoir. »
Morgane s´arrêta au milieu de la pièce du deuxième étage. Elle fixa Ikeda de ses yeux virant au gris.
« Pourquoi ? Pourquoi dites-vous ça ?
- Ils ne méritent pas votre confiance, reprit l´homme sans perde son air froid. Ils risquent de vous trahir un jour.
- Qu´est-ce qui vous permet d´en juger ? » hurla soudain la championne qui ne comprenait pas cet élan prophétique soudain chez le dresseur aux cheveux pourpres.
Il ne répondit pas. Ses yeux étaient vides. La championne allait à nouveau répartir en criant sous l´effet de la peur lorsque le visage de Ikeda changea soudain. Il sembla se réveiller d´un long sommeil. Ses yeux reprirent une lueur de vie, son sourire doux réapparut.
« Scuzia, mi Riena. Je ne voulais pas vous effrayer. Veuillez accepter toutes mes excuses. »
La jeune femme ne sut quoi répondre.

Les deux champions observèrent Morgane et Ikeda qui venaient de les rejoindre. Aucun d´eux ne dit mot, mais les deux hommes ne pouvaient ignorer la mine déconfite qu´affichait la championne. Le voyage jusqu´au Centre se fit dans le plus grand silence. Ils demandèrent quatre chambres et se séparèrent. Dans le couloir qui menait aux différents logements. Lorsque Koga et Ikeda eurent disparu derrière les portes qui leur étaient assignées, le militaire agrippa le bras de la championne avant qu´elle n´entre à son tour. Celle-ci eut un mouvement de recul, puis tourna vers lui un regard agressif.
« Qu´est-ce que tu veux ? Excuse-moi mais ce n´est pas le moment de...
- Qu´est-ce qu´il t´a dit pour te mettre dans un état pareil ? » demanda le champion d´une voix douce.
Le colosse pouvait se vanter d´être l´un des seuls êtres (avec Koga et les pokémons de la jeune femme) à connaître suffisamment Morgane pour la savoir dans un état de détresse avancé, ce qui expliquait son agressivité supérieur à celle qu´elle présentait habituellement. La championne hésita avant de répondre fermement.
« Ça ne te regarde pas.
- Je crois qu´il essaye de nous diviser. »
Morgane se tut, et fixa le grand homme avec stupeur. C´était pourtant vrai, en y réfléchissant bien, les paroles de Ikeda étaient absurdes, elle n´avait aucune raison d´y prêter attention. Et pourtant, à cet instant, sa voix lui avait parut si sûre, témoin d´une vérité qu´elle ne pouvait imaginer. Une force invisible semblait l´avoir poussée à croire aux paroles du dresseur, une force à laquelle elle ne pouvait se soustraire. Lentement, elle baissa la tête.
« Excuse-moi... »
Le champion lâcha son bras et lui sourit.
« T´en fais pas. De toute façon on aurait dû s´attendre à ce genre de choses.
- Je vais appeler Peter et lui demander plus d´informations sur cet homme.
- Ok, et après tu me rejoins dans ma chambre ? J´ai quelque chose à te montrer ! C´est la porte numéro... »
Le sourire de la jeune femme disparut derrière sa porte.

Morgane sortit son téléphone portable de son sac et tapa le numéro privé du président du Conseil. Celui-ci répondit au bout de trois sonneries. La jeune femme lui demanda de la mettre en liaison avec Peter en précisant qu´elle avait besoin d´informations importantes que seul le maître des Quatre pouvait lui donner. Le président hésita, protesta plusieurs fois, mais comme toujours, la jeune femme sut trouver des paroles fermes et des éléments implacables pour obtenir sa liaison.
« Peter à l´appareil. Vous êtes Morgane de l´arène de Safrania ?
- Oui, c´est moi qui ai demandé cette conversation au président. Je suis désolée de vous déranger à une heure pareille.
- Vous n´avez pas besoin de vous excuser, répondit la voix calme du maître. Si j´ai bien compris, vous êtes sur l´affaire Kao ? Malheureusement je ne pense pas pouvoir vous donner plus d´informations que celles que vous possédez déjà.
- Je vous remercie, mais il ne s´agit pas de Kao. »
Le silence se fit à l´autre bout du fil, et Morgane comprit qu´elle avait toute l´attention de son interlocuteur.
« Un homme a été envoyé pour nous porter main forte, un dresseur du nom de Keiji Ikeda. Vous le connaissez ?
- En effet. Il a vaincu le Conseil des Quatre il y a deux ans de cela. Je l´ai revu une ou deux fois depuis.
- Vous l´avez combattu ?
- Oui.
- ... J´imagine que vous ne pourrez pas me donner la constitution de son équipe ? tenta la championne.
- Vous devriez savoir que le code de la Ligue nous interdit ce genre de révélation lorsqu´il s´agit de dresseur travaillant à son service, répondit la voix du maître trahissant un sourire.
- Bien sûr... mais j´aurais néanmoins besoin de quelques informations à son sujet.
- Problème de confiance ? Basez-vous vos craintes sr des preuves ou sur votre instinct ?
- Instinct, murmura la jeune femme.
- Je vous écoute.
- Avez-vous pris connaissance de la fiche de réseau personnelle de Ikeda ?
- Je suis en train de le faire.
- Est-ce que la description physique et la photo présentée correspondent à vos souvenirs ?
- Oui, il me semble... cheveux pourpres, yeux noirs, gourmette en argent sans nom distinctif, ... aucun doute c´est bien lui. Il avait juste les cheveux un peu plus courts mais portait même déjà ce bandana, on croirait qu´il n´a pas changé en deux ans.
- Que savez-vous de son caractère ?
- Un sourire d´ange, peu de paroles. Très respectueux dans son langage et dans ses gestes.
- Hum..., soupira la championne. C´est son portrait craché...
- Qu´est-ce qui vous dérange chez lui ? Si je me souviens bien c´était quelqu´un d´assez renfermé. Nous n´avons pas beaucoup de choses sur ses liens familiaux... juste une sœur plus âgée qu´il n´aura pas revue depuis onze ans. Je l´ai vu quelque fois regarder dans le vide comme s´il ne se souciait plus de ce qui l´entourait, mais il gardait toujours un visage très doux.
- Oui, j´ai remarqué cette forme d´absence étrange. Mais je ne peux pas baser mon manque de confiance sur ce genre de tic. C´est une facette à part entière de sa personnalité... »
Il y eut un silence. Peter semblait réfléchir tout autant que la jeune femme. Quelque chose fit soudain surface dans son esprit. Elle hésita, puis finit par reprendre d´une voix lente.
« Est-ce que... dans vos souvenirs... Est-ce qu´Ikeda avait un accent ?
- Un accent ? Pas à ma connaissance non... quel genre d´accent ?
- Un accent latin très prononcé, une langue du sud il me semble.
- La langue des Dieux ? » prononça la voix de Peter qui semblait s´être aggravée.
Morgane ne répondit pas, ne comprenant absolument pas ce que le maître avait voulu dire. Son cerveau tenta de décrypter ces mots mais n´y parvient pas. Elle entendait les doigts agiles du dresseur de dragons pianoter à toute vitesse sur un clavier d´ordinateur.
« Pourquoi des Dieux ? demanda-t-elle finalement.
- Ikeda n´avait pas d´accent. Sûrement pas un accent pareil. Les langues que l´on appelle «langues du sud» sont très peu employées aujourd´hui, sauf par quelques chercheurs. Les langues latines sont considérées comme mortes, n´est-ce pas ?
- C´est ce qu´il me semble, mais certaines rumeurs disent...
- ... qu´il existe encore des personnes parlant couramment ces langues anciennes dans le sud du continent principal. On les considère comme un seul et même langage appelé « langue des Dieux », car beaucoup de textes anciens concernant les hommes et les légendaires sont écris dans cette langue. Le sud de Ihien est connu pour ses grandes découvertes à ce sujet et son abondance de ruines des civilisations anciennes vénérant les grands dieux mythologiques. Ces rumeurs ne sont pas fondées. Si vous voulez mon avis, ce n´est qu´une sorte d´expression pour désigner le nombre de chercheurs qui vivent et travaillent là-bas.
- Ikeda serait un chercheur ?
- Je ne pense pas. Tout comme je doute qu´il ait appris à maîtriser cette langue et à développer un accent prononcé en deux ans.
- Il s´agit donc d´un imposteur...
- C´est probable.
- Pourquoi doutez-vous qu´il s´agisse d´un chercheur ? Et si ce n´est pas le cas, quel besoin aurait-il de connaître cette langue ?
- Je ne pense pas qu´il s´agisse d´un chercheur car les hommes possédant une autorisation pour fouiller ce genre de site ont de longues années d´expérience derrière eux. Ikeda est trop jeune. On ne peut pas être chercheur sur les sites de Ihien et dresseur à la fois, à moins d´être un sénior. Pour ce qui est de connaître la langue... je ne sais pas...
- Y a-t-il des descendants des lignées anciennes de ces peuples ?
- D´après les livres d´Histoire... (il se tut un instant tandis que ses doigts pianotaient toujours) ... tous ces peuples ont été massacrés au moment des guerres Kanto/Hoenn.
- Pas de liens possibles donc ?
- Non, je doute que ce soit possible... »
Un nouveau silence se forma. Morgane classait à toute vitesse les informations qu´elle venait d´apprendre. Comme souvent, ses yeux s´éclaircirent légèrement alors que son cerveau fonctionnait rapidement pour tout analyser.
« Morgane ? »
La jeune femme sortit de ses réflexions brutalement.
« Oui ?
- Je vais vous donner la composition de l´équipe de Keiji Ikeda à l´époque où je l´ai combattu, ainsi que son mode de combat. Cet homme est un imposteur, mais s´il a décidé de copier le mode de vie de ce dresseur dans les moindres détails...
- Je l´observerai et je vous enverrais tout ce que je sais.
- Je vous ferai parvenir mon adresse home et mon code de reconnaissance dès demain.
- Merci. »
Le maître attendit un instant, sans doute pour permettre à la championne de se munir d´un stylo, ou de quoi prendre des notes, mais elle ne bougea pas, attendant patiemment ses paroles. Son cerveau était la meilleure banque de données possible. La plus sûre.
« Lors de son ascension au Conseil des Quatre, il a fait preuve d´une grande sûreté et de tactiques efficaces. Il possédait un Noctali plutôt difficile à mettre à terre, un Pyroli assez jeune mais qui maîtrisait de nombreuses attaques de Feu offensives et défensives, un Lokhlass fin tacticien avec une défense surprenante, un Meganium usant de la vitesse et d´une grande variété de techniques, et enfin, un Tyranocif jouant à la perfection son ràle de tank vivant. Il comptait beaucoup sur son Noctali pour cuisiner ses adversaires avant d´envoyer ses autres combattants...
- Il n´avait que cinq pokémons ? le coupa soudain Morgane.
- Euh... oui... en tout cas il n´a utilisé que ceux que je viens de vous citer... il me semble qu´il n´avait que cinq pokéballs en effet.
- Très bien, je vais observer ses méthodes de combat.
- Est-ce qu´il vous serez possible de les filmer ? » s´empressa de demander le dresseur de dragons.
Morgane réfléchit. Koga serait certainement en mesure de s´occuper de ce genre d´observation dissimulée, le plus dur serait de lui en expliquer les raisons sans lui dévoiler tout ce qu´elle savait. Elle ne savait pas pourquoi mais... elle ne pouvait pas lui faire confiance. Une voix le lui disait, le lui ordonnait au fin fond de son esprit. Elle ne connaissait pas cette voix, elle ne l´avait jamais entendu, sauf... face à Ikeda. Elle secoua la tête. Quoi qu´il en soit elle ne faisait pas assez confiance à Koga, ni au Major pour leur dévoiler ce qu´elle avait tiré de cette discussion. Koga était un ninja, et un espion parfait ; si elle lui fournissait quelque chose qu´il désirait en échange, il ferait ce qu´elle attendait de lui sans poser de questions.
« Oui, répondit-elle enfin. Comment est-ce que je pourrais vous faire parvenir les cassettes ?
- Je vous enverrais mon Ptera pour vous faire parvenir mes coordonnées home. Nous communiquerons grâce à lui et uniquement grâce à lui. Même si nous n´apprenons rien de nouveau, nous le renverrons vers l´autre au bout de deux jours maximum pour nous tenir au courant.
- Très bien.
- Vous êtes dans un Centre ?
- Oui, au Centre de Céladopole.
- Mon Ptera devrait vous parvenir demain matin, avant 7h00.
- J´irais derrière le Centre pour ne pas attirer l´attention plus qu´il n´en faut.
- Parfait, répondit la voix du maître, dévoilant un nouveau sourire entendu. Je vais continuer à faire quelques recherches sur les peuples anciens de Ihien. »
Morgane hocha la tête. Elle salua finalement le dresseur de dragons et raccrocha. Son portable sur les genoux, elle réfléchit à nouveau. Elle resta immobile, assise sur la chaise de bureau, à demi penchée en avant, pendant plus d´une heure. Puis elle se déshabilla, et alla s´enfouir sous les draps froids du lit qui lui était destiné.

Peter raccrocha et soupira. Comme tous les dresseurs qui lui avaient semblés dignes d´intérêt, Keiji Ikeda était un homme qui lui avait inspiré un profond respect. Il n´accepterait pas que quelqu´un ose prendre sa place et son apparence de cette façon. Il passa une main dans ses cheveux rouges repoussés vers l´arrière. La pénombre qui régnait dans la pièce n´était brisée que par la faible lueur de son écran qui dévoilait son visage fin. Ses yeux d´un noir d´ébène se posèrent sur Ptera, ou plutôt, sur son regard acéré, seule partie visible du reptile accroché au mur de la chambre. Il se retourna vers son ordinateur, et ses doigts reprirent leur course folle sur le clavier.

Aucun bruit. Aucun mouvement. Peut-être qu´il dort ? Non, j´en suis sûr. Il est là, assis, dans sa chambre. Il ne bouge pas.
Le grand champion avait posé ses mains sur la porte et s´en était doucement approché. Puis, lentement, il s´était collé à elle, le visage tourné vers la gauche, l´oreille contre le bois froid. Son regard était étrange, curieux, comme celui d´un enfant. Raichu se tenait debout sur ses pattes arrières, à quelques mètres de son dresseur. Son petit corps était tendu. Il n´aimait pas vraiment ça, mais il n´osait rien dire, il n´osait pas l´interrompre. Ses yeux posés sur le militaire étaient tristes. Il ne le comprenait pas. Il était si rare que cela arrive. Alors il attendait, patiemment. Il attendait un signe, peut-être une explication. Pourquoi le champion semblait-il éprouver une telle fascination pour l´homme qui se cachait derrière cette porte ? Ce... Ikeda n´était pas quelqu´un de bien. Il en était sûr.
Le grand homme ferma les yeux. Il pouvait sentir d´ici l´odeur du dresseur. Son odeur si particulière qui ne lui avait pas échappée. Elle éveillait en lui un sentiment étrange. Son instinct lui soufflait qu´il était de son sang, même s´il ignorait ce que cela signifiait vraiment. Il avait envie de combattre cet homme, comme s´il était son ennemi naturel. Ses yeux bleus réapparurent de sous ses paupières, et il fixa la porte. Ikeda devait savoir qu´il était là, sur le palier, à essayer de deviner qui il était vraiment. Etrangement, il commençait à rager. Il voulait savoir qui était cet homme, il le voulait. Mais l´homme ne bougeait pas. Il restait dans sa chambre, sachant parfaitement qu´il était là et l´ignorant, souriant peut-être. Cette situation l´irritait. Il avait envie de défoncer cette foutue porte en bois. Ces sentiments violents dont il avait cru être débarrassé en quittant l´armée... ils revenaient à la charge sans qu´il comprenne pourquoi. Il n´était pas sur un champ de bataille, il n´était pas en danger, du moins pas en apparence, songea-t-il. Alors pourquoi ?
Raichu frissonna. Il n´aimait pas la lueur dangereuse et cruelle qui venait de naître dans les yeux azurés de son dresseur, ni ses pupilles rétractées qui faisaient penser à celles d´un fauve sur le point d´attaquer. Il ne pouvait pas le laisser continuer. Il lui semblait que l´homme aux cheveux blonds venait de retourner quelques années en arrière. Et il n´aimait pas ça du tout. Il hésita, puis s´avança jusqu´aux pieds du militaire.
« Rai... (il est tard...) »
L´homme parut sortir de sa transe. Il baissa les yeux vers le rongeur, des yeux interrogateurs qui le faisaient à nouveau paraître plus jeune. Il finit par acquiescer, et quitta le contact de la porte, non sans regret. Il s´accroupit, sourit à Raichu, et lui tendit son bras. Le rongeur sourit à son tour, et grimpa sur l´épaule de son dresseur. Ils retournèrent dans leur chambre, sans un bruit.

La lune parfaitement ronde était pâle comme la peau d´un cadavre. Koga la fixait intensément. L´air frais de la nuit enveloppait son visage d´une étreinte agréable. La brise sentait l´eau, l´herbe humide, la sève qui s´écoulait sous l´écorce des grands arbres. Ses yeux noirs quittèrent l´astre, et se tournèrent vers la forêt sombre et silencieuse qui se dressait derrière le Centre, hors de la ville. Le hululement d´un Noarfang venait quelques fois briser le silence nocturne. Les spectres invisibles de ces ténèbres cavalières l´attiraient. Dans cette chambre, derrière lui, une noirceur domestiquée, oppressante, sans vie. Devant lui, dans l´étendue nocturne, la fraîcheur autonome, la liberté de mouvements, les pensées nomades. Les êtres de la nuit, de la même essence que la mienne...
Son esprit vagabond fut rappelé à lui lorsqu´il sentit la protection de son bras se resserrer là où Nosferalto s´était posé. Le vampire battit des ailes un instant, puis s´accrocha à l´épaule de son dresseur en y plantant l´une de ses griffes effilées surmontant la membrane de ses organes de vol. Le ninja sentit le crochet acéré s´enfoncer dans sa chair, sous son vêtement. Il tourna la tête vers la chauve-souris. Celle-ci s´immobilisa, plantant son regard dans le sien. L´anneau noir de son aile gauche cessa de carillonner. Koga caressa un instant le dos du petit mammifère, et massa les muscles qui lui servaient à voler.
Un son bref, presque indécelable, comme le bruit d´un vêtement qui se froisse s´échappa sur sa gauche. Le champion tourna la tête pour voir la silhouette du militaire, son rongeur sur les talons, disparaître dans l´obscurité de la forêt. Sa fenêtre, voisine à la sienne, était grande ouverte. Il resta immobile pendant un instant. Son compagnon avait eu la même idée que lui. Il avait lui aussi besoin d´air et d´espace, c´est pour cela qu´il avait choisi Carmin et qu´il n´était pas toujours présent à l´arène. Mais il reviendrait bien assez tôt, Koga le savait. Il n´était pas fait pour la nuit. Elle n´est pas son « territoire ». Son « territoire » c´est le jour, la lumière, la chaleur. Le ninja posa à nouveau son regard sur la sphère blafarde. Derrière lui, le réveil à la lueur rouge synthétique indiquait 23h00. Son heure. L´heure où ce territoire devenait le sien. Ses mains quittèrent le dos du vampire pour venir s´agripper à ses griffes postérieures. Le mammifère émit un sifflement strident puis prit son envol.
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