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Lecture d'un chapitre



Lecture du chapitre 27
Nom de l'œuvre : Les légendes du Mordz Nom du chapitre : Chapitre 25 : La Dame Sanglante
Écrit par Requiem Chapitre publié le : 22/12/2010 à 22:15
Œuvre lue 60262 fois Dernière édition le : 22/12/2010 à 22:15
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Il existe une légende dans le Mordz. Elle commence par une nuit sans lune, où des parents abandonnèrent leur bébé qu’ils ne pouvaient pas nourrir. L’histoire ne dit rien sur comment survécu la fillette mais, des années plus tard, on retrouva les parents complètement déchiquetés et vidés de leur sang.
C’est ainsi que commença une longue série de meurtres. On raconte que la seule chose que voyaient les victimes avant de mourir était une ombre dotée de deux grandes ailes noires et de deux yeux jaunes comme le soleil, brillants comme des étoiles dans la nuit. Voilà comment naquit la légende de la Dame Sanglante.
Shaka avait une peau blanche de nacre et de longs cheveux noirs de jais qui frôlaient le sol à chacun de ses pas. Elle braqua ses grands yeux sur le soldat qui était venu la déranger. Il tremblait comme une feuille.
- Que veux-tu, malandrin ? demanda-t-elle de sa voix incroyablement mélodieuse pour son apparence.
Le soldat avala sa salive.
- Les… Les troupes se sont positionnées autour du campement de l’ennemi comme vous l’aviez commandée. Nous attendons vos ordres.
- Mes ordres, malandrin ?
Shaka rejeta sa nuque en arrière et se mit à rire à gorge déployée. Ses ordres ? Il ne manquait plus que ça. Elle ne donnait d’ordre à personne. Tout ce que les soldats avaient à faire c’était de rester hors de sa portée quand elle irait se battre. Enfin, s’ils tenaient à mourir ça ne lui posait pas de problème mais les Trois apprécieraient moyennement qu’elle écrabouille également leur armée.
Elle devait quand même rassurer le malandrin, cette pauvre chose qui rampait sur le même sol qu’elle dans une pathétique imitation de la vie.
- Tenez les positions, c’est tout ce que des malandrins comme vous êtes capables de faire.
Sans faire plus attention au soldat elle sortit de sa tente personnelle et observa la nuit. C’était la pleine lune et les étoiles scintillaient dans le ciel. Elle profita de la brise qui courait sur son visage. Une si belle nuit… Bientôt la lune deviendrait rouge et un bain de sang coulerait. Elle se baignerait alors pendant que les hurlements des malandrins retentiraient dans la nuit.
Elle avança en direction de la butte où étaient stationnées les troupes de l’armée du Soleil. La ligne de ses soldats entourait la petite colline, empêchant toute personne de s’échapper. Personne ne survivrait.
Ses pas étaient amortis par l’herbe. Elle se déplaçait aussi silencieusement qu’une ombre. Elle dépassa la ligne de soldats qui ne la remarquèrent même pas. Ils étaient tellement aveugles dans la nuit… Elle, y voyait parfaitement. Enfin, le terme exact était qu’elle percevait parfaitement. Elle pouvait suivre les flux du sang des deux mille sept cent corps présents à cet endroit. Il y en avait mille sept cent sur la colline. Une fois qu’il n’y en aurait plus un seul, elle rentrerait au château et irait s’enfermer dans sa chambre pour y dormir, repue.
La Dame Sanglante arriva tout près d’une sentinelle ennemie. Elle passa derrière elle puis se rapprocha en silence. D’un coup sec elle lui tordit le cou et il s’écroula sur le sol comme une vulgaire poupée. C’était si facile. Elle se remit à vagabonder, prenant la vie comme une paysanne fauche les germes de blé dans les champs.
Au loin, des clameurs survinrent. Shaka comprit que les forces de l’Armée du Soleil venaient de commencer leur assaut sur sa ligne de siège. Elle avait été très claire, il ne devait pas y avoir de brèche dans les rangs. Au matin l’herbe serait rouge et les corbeaux se repaîtraient des corps fumants de ses victimes.

Shadow Angel avait engagé la bataille contre les troupes des Trois. Ceux-ci les avaient encerclés empêchant le groupe de Véon et d’Elvish de s’éclipser discrètement pour se rendre au château des Trois. Il n’avait qu’un seul but en tête : faire tomber la ligne et ouvrir une brèche pour leur permettre de fuir.
Lui et les hommes sous ses ordres se battaient au cœur de la foule dense de soldats. La formation adoptée par l’armée des Trois était très peu avantageuse pour eux. Shadow ne comprenait pas la stratégie de celui qui avait ordonné cela. L’Armée du Soleil était plus nombreuse, cela ne servait à rien de disperser les troupes, ça ne faisait que fragiliser la ligne de soldats qui tentaient de les assiéger.
Cependant cette même ligne tenait bon, comme mû par un courage ou une peur supérieur à celui de ses propres guerriers. Shadow taillada un bras et se retourna pour voir où en étaient ses hommes. Ses yeux s’écarquillèrent en voyant que plus de la moitié étaient à terre, complètement éviscérés. Que se passait-il ? Il sentait la peur et l’odeur de la mort tout autour de lui. Il se rendit soudain compte que les soldats ennemis avaient eux-mêmes cessé de combattre et se repliaient en formation serrée en empêchant quiconque de forcer leur rangée.
Shadow et ses troupes restèrent étonner devant ce spectacle, ne comprenant pas ce qu’il se passait. Quel était donc le but de cette manœuvre ? Encore une fois le nouveau général en chef de l’armée du Soleil à Cinq Branches ne voyait aucune logique à cette action. Cherchait-on à déstabiliser son armée ?
Il en était encore à ses réflexions sur la nébuleuse stratégie des Trois quand un cri, puis deux, puis trois résonnèrent à quelques secondes d’intervalle tout près de lui. Il fixa les ténèbres d’un air inquiet. Les torches qui avaient été allumées n’éclairaient pas beaucoup, seules les plaques d’armure reflétaient la lumière et lui indiquaient la position de ses hommes.
Les cris ne cessèrent cependant pas et il se précipita dans leur direction, suivi par une dizaine de soldats. Le temps qu’il parvienne à l’endroit d’où avait semblé provenir les hurlements il ne restait plus rien. Tout le bataillon ouest avait été décimé. Les tripes des soldats pendouillaient à l’air libre pendant que le sang giclait encore, souillant les visages déformés à jamais par la douleur et la peur panique. Un vide se forma au creux de son estomac. Il n’y avait qu’une seule personne capable d’un tel carnage. Une seule personne pour ordonner une stratégie militaire aussi suicidaire. La Femme de l’Ombre, la Dame Sanglante, le Vampire, la Juge numéro VI, Shaka. Tels étaient les noms que les légendes lui prêtaient.
Le général en chef ordonna à ses soldats de se mettre en formation circulaire. Il ne fallait pas laisser leur ennemie les surprendre. Avec un angle de vue à 360 degrés, elle ne pourrait pas les prendre à revers. Du moins c’est ce qu’il croyait.
Il sentit comme un souffle froid dans sa nuque. Il voulut se retourner, l’épée au poing pour trancher la chose qui se trouvait derrière lui, mais déjà un étau de fer se refermait autour de son cou. Il essaya de se débattre mais la pression exercée était trop forte. Ses hommes le regardaient fixement mais n’osaient pas bouger.
- Si vous remuez le moindre petit doigt, je répands les tripes de votre chef sur le sol, fit une voix à la fois mélodieuse et menaçante.
- Ne l’écoutez pas !
- Chut toi ! (Elle resserra son étreinte.) On ne t’a pas demandé ton avis.
Shadow Angel suffoquait. Il n’arrivait presque plus à respirer tellement la pression qu’exerçait la main de Shaka sur sa gorge était puissante. Des étoiles commencèrent à danser devant ses yeux et il crut perdre connaissance lorsque tout devint soudainement noir.
Une vive douleur au nez le ramena à la réalité aussi sec. Il n’avait pas perdu connaissance. Shaka l’avait tout simplement lâché et il était tombé au sol, se fracturant le nez par la même occasion.
Il ne chercha même pas à comprendre pourquoi la plus grande tueuse du Mordz l’avait relâché. Il tâtonna dans l’herbe, à la recherche de son épée qu’il avait fait tomber. Il la trouva plantée entre deux touffes d’herbes et se redressa, prêt à combattre Shaka. Mais celle-ci semblait l’avoir complètement oublié et était occupée ailleurs avec la dernière personne à laquelle Shadow aurait pensé.
Gloom. Le vieil homme portait dans sa main ridée une épée courte. Il se tenait debout, son fauteuil roulant avait glissé en bas de la colline. Ses yeux laiteux fixaient le vide. Il n’avait aucune chance contre elle ! Shaka se déplaça sur le côté mais Gloom ne bougea pas. Evidemment, il ne pouvait pas la voir ! Shadow tenta de crier au conseiller de la reine de faire attention à sa gauche mais il ne parvint qu’à exprimer un râle désarticulé. Il était momentanément muet à cause de la pression que Saka avait exercée sur sa gorge. Il n’arriverait pas non plus à se déplacer assez vite pour sauver Gloom, trop éloigné.
Shaka bondit sur sa nouvelle victime, ses mains griffues en avant. Gloom n’avait toujours pas bougé. Mais au moment où tout semblait perdu le conseiller fit un pas de côté, donna un coup de lame et redevint immobile.
La Dame Sanglante s’étala sur le sol. Shadow espéra pendant un instant qu’elle était morte mais il la vit bouger, puis se relever. Elle avait une profonde entaille qui lui partait du front et descendait jusqu’au menton. C’était un miracle qu’elle soit toujours en vie.
- Enflure… Comment as-tu fais ? persifla-t-elle pendant que du sang lui dégoulinait des lèvres et de toute la longueur de la blessure.
Les lèvres ridées de Gloom formèrent ce qui paraissait être un simulacre de sourire. Shadow se souvint alors qu’à une époque, avant même de devenir un brillant généticien, Gloom avait été considéré comme un puissant guerrier du Mordz. Mais c’était bien avant la naissance de Shadow ! En engageant ainsi le combat, le vieillard aveugle ne commettait pas moins qu’un suicide.
- Je suis aveugle, Shaka, répondit calmement l’intéressé.
- Oui, et alors ?
- La plupart d’entre nous nous reposons principalement sur notre vue en négligeant nos autres sens. Moi qui depuis bien longtemps ne suis plus capable de distinguer la lumière, j’ai développé mes autres sens. L’odorat, l’ouïe, le touché remplacent ma vue. Pour quelqu’un de normal il serait impossible de t’entendre t’approcher mais pour moi c’est comme si tu jouais du tambour. Tu ne peux pas m’approcher sans que je ne m’en rende compte.
Le teint pâle de Shaka vira à une légère nuance de rouge. La colère bouillait en elle comme un volcan sur le point de rentrer en irruption. Gloom l’avait mise en pétard et il aurait fallu être fou pour rester dans les environs du combat qui s’annonçait.
Shadow Angel avait une mission à accomplir. Il devait permettre à ses amis de s’échapper en perçant la ligne de défense adverse. Il devait profiter que Shaka soit occupée avec Gloom pour réussir.
Ordonnant à ses soldats de le suivre, il se relança au cœur du combat. Les troupes ennemies, surprises par ce renouveau de vigueur, ne tardèrent pas à montrer des signes de faiblesses puis, laissèrent carrément des fissures béantes dans leur ligne. Les soldats de l’Armée du Soleil en profitèrent pour s’y engouffrer et les agrandir à coup de masses, d’épées ou d’arcs et de flèches.
Le groupe formé par la reine pour s’introduire dans le château des Trois passa à côté de lui. D’un signe de tête, il leur souhaita bonne chance. Ils en auraient besoin. Puis, il se remit à combattre.
Pif et les autres passèrent sans problème les lignes adverses et s’enfoncèrent dans la nuit. Shadow espérait une chose. C’est qu’il les reverrait un jour. Maintenant que cette mission était terminée, il en avait une autre, toute aussi importante, à mener à bien : défendre la reine Illyria au péril de sa vie. Elle devait se trouvait au sommet de la colline, là où l’Armée du Soleil avait monté son camp. Vu la stratégie adoptée par Shaka et si Gloom parvenait à la retenir jusqu’au matin, alors il avait toutes les chances de réussir.
Soudain un soldat vint le rejoindre alors qu’il se débarrassait d’un adversaire. Il était essoufflé et aussitôt Shadow devint anxieux. Il n’apportait pas de bonnes nouvelles. Etait-ce Gloom qui venait de mourir permettant à Shaka de continuer son massacre ou bien quelque chose de plus terrible encore ?
- Général ! La… La… La reine a disparu !!!
Le sang dans les veines de Shadow se figea et son cœur manqua un battement. Impossible ! La reine était surprotégée… Elle ne pouvait pas avoir simplement disparu. Comment ?
- Quand ? demanda-t-il au soldat en le secouant par les épaules.
Le gars prit un air embêté.
- Depuis que nous avons fait passer le groupe qui doit se rendre au château.
Le général scruta brusquement les ténèbres qui s’étendaient au loin dans le vain espoir d’apercevoir la reine saine et sauve ou Elvish la ramenant inconsciente sur son épaule. Mais il ne distingua qu’une profonde noirceur. Oh, non ! se dit-il. Tout mais pas ça…
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