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Lecture du chapitre 30 | |
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Nom de l'œuvre : Les légendes du Mordz | Nom du chapitre : Chapitre 28 : Dégradation |
Écrit par Requiem | Chapitre publié le : 22/12/2010 à 22:18 |
Œuvre lue 60278 fois | Dernière édition le : 22/12/2010 à 22:18 |
Véon se trouvait dans la salle du trône aménagée dans l’ancienne salle de réunion des Juges. Le trône se trouvait au fond de la pièce, Illyria était assise dessus. A sa droite se tenait Janus et à sa gauche Shadow Angel. Elvish était en tablier blanc et astiquait avec acharnement un chandelier déjà propre depuis longtemps. Pendant deux mois, un relatif calme s’était installé sur le Mordz. Cependant des indicateurs leur avaient récemment signalé des troubles dans le sud du pays. Petit à petit l’agitation grandissait. La rumeur qu’une bande de pillards avec à leur tête un homme maniant une épée invisible qui sévissait dans l’arrière pays était parvenue jusqu’aux oreilles de la reine. - Nous ne pouvons pas laisser Ganon agir à sa guise. Si nous le laissons faire, il aura d’ici peu constitué une nouvelle armée. Shadow Angel secoua la tête d’un air désolé. - Nos forces sont trop faibles. Si nous envoyons un contingent de soldats, il ne restera plus rien pour protéger la capitale en cas d’attaque. Nous n’avons pas assez de soldats de réserve. - Mais si nous laissons faire Ganon, ce sera une nouvelle guerre qu’il risque de nous affliger, contre-attaqua Illyria. Le chef des armées ne répondit pas mais à sa tête il était évident que l’entêtement de la reine à vouloir écraser une menace mineure tout en laissant la Capitale sans défense ne lui plaisait pas outre mesure. Véon le comprenait également mais il était aussi inquiet de l’importance que pourrait prendre Ganon et sa bande dans l’avenir. En effet, parmi eux se trouvaient encore le meurtrier Zenight, la Juge Silver Altari et la très dangereuse Dame Sanglante. Les ignorer trop longtemps serait fatal. Le dilemme constituait aussi qu’attaquer maintenant, avec le peu de force disponible, serait stupide. Bizarrement, Janus était resté silencieux. Maintenant qu’il savait la vérité sur ses origines, il ne disait plus grand-chose, se contentant d’observer en silence les débats entre la reine et ses conseillers. Son regard était toujours dans le vague, comme s’il était ailleurs et n’écoutait plus que d’une oreille. - Voulez vous que je nettoie votre trône, ma dame ? La voix d’Elvish fit sursauter Véon. Il avait presque complètement oublié sa présence. Son ami avait perdu l’esprit et aucun signe d’amélioration n’encourageait son rétablissement. Il allait certainement demeurer dans cet état jusqu’au terme de sa vie. Du coin de l’œil, Véon vit le regard de la reine s’humidifier. Bien sûr aucune larme ne coulait mais il sentit bien qu’elle faisait des efforts pour les réfréner. - Plus tard Elvish, plus tard. Redressant son dos, il fit alors une révérence à la reine et se mit à laver le sol avec une vieille brosse tout en sifflotant gaiement. Illyria se tourna alors vers Janus : - Tu es sûr qu’il n’y a vraiment aucun moyen de lui faire recouvrer la mémoire ? Tu es bien un scientifique, il doit y avoir une solution. Janus dévisagea la reine en silence. Puis après un haussement d’épaules il répondit : - On peut toujours essayer de lui fracasser la tronche jusqu’à ce qu’il se souvienne de ce qu’il lui est arrivé. Personnellement je le trouve très bien dans le rôle de la bonne à tout faire. - Comment peux-tu dire ça de l’homme que j’aime ? se récria la reine. Une fois de plus son demi-frère se contenta de la regarder sans répondre. Soudain, comme un éclair qui traverse le ciel, Véon comprit la raison de la réticence de Janus à tenter de guérir Elvish. Janus même s’il l’avait ignoré longtemps n’en était pas moins le frère d’Illyria. Par conséquent il voyait d’un mauvais œil le fait que la reine puisse s’enticher d’un jeune homme et l’aimer. Comme n’importe quel frère, il devenait protecteur. La raison était peut être à l’origine louable mais elle était quand même assez cruelle de sa part. Soit Janus ne voulait pas soit il ne pouvait pas faire quelque chose. Il avait été amnésique durant des années, d’après ce qu’avait compris Véon et personne n’avait rien pu y faire jusqu’à ce qu’il retrouve subitement la mémoire lorsque la Pierre brisée avait courbé l’espace/temps et téléporté dans le futur Véon et compagnie. - S’il vous plait Janus, minauda alors Véon d’un ton suppliant. Apprenez au moins à connaître la véritable personnalité d’Elvish avant de le condamner. Le frère de la reine toisa le mordzien du regard, l’air contrarié. Véon déglutit péniblement, il aurait peut être mieux fait de se taire. Cependant il vit dans le regard de la reine une lueur de reconnaissance et cela le conforta dans sa décision de tenir tête à Janus. - Je connais Elvish depuis plus longtemps que toi, répondit Janus d’un ton glacial. C’est juste un tire-au-flanc qui mérite ce qui lui arrive. - Vous connaissez Elvish ? demanda Véon interloqué, croyant à peine ses oreilles. - Evidemment, puisque je le dis. En tout cas il est hors de question que la reine épouse ce roturier. Le visage d’Illyria s’empourpra. De sa vie, c’était la première fois que Véon la voyait si en colère. Elle qui était d’habitude si calme, titiller son amour pour Elvish semblait la faire sortir de ses gongs. - Janus ! J’aime qui je veux, tu n’as rien à redire là -dessus. Je suis la reine et c’est moi qui décide alors essaye de rendre la mémoire à Elvish ou… ou… ou je te bannis ! L’ambiance était devenue électrique et la tension presque palpable. Shadow Angel toussota mais Janus et Illyria firent comme s’ils ne l’avaient pas entendu. Ils se regardaient droit dans les yeux comme pour déchiffrer une quelconque faiblesse chez l’autre. Véon hésita à lancer une vanne pour détendre l’atmosphère mais avec son sens de l’humour bidon il risquait surtout de se prendre un pied dans la partie charnue de son anatomie. Enfin, au bout de ce qui sembla être une éternité, Janus haussa les épaules et descendit de son siège. Il salua roidement la reine. - Puisque vous ne nécessitez pas mes services, ma reine, commença-t-il d’un ton sarcastique, je vais prendre mon congé et me retirer dans les Mortes Terres de Colossin pour y subir mon exil. Et sans que la reine puisse placer un mot, il se détourna et marcha d’un pas rapide en direction de la porte. En passant près de Véon, il lui glissa à l’oreille de manière à ce que seul lui puisse l’entendre : - Elle ne doit pas s’attacher a lui, ni lui à elle. Vous ne faites pas parti de cet espace/temps. Quand vous devrez retourner à votre époque, tout ce que vous aurez vécu ne sera plus qu’une illusion, un rêve, un souvenir. Quand vous m’aurez tué et que le Cataclysme aura été empêché, Elvish et Illyria ne se rencontreront probablement jamais. Ce que vous êtes en train de vivre et un scénario impossible de l’Histoire. Elvish ne doit PAS rester ici ou tous vos efforts pour empêcher que les évènements qui se sont déroulés depuis le Cataclysme ne se réalisent seront vains. - Et si je décidais de rester dans ce temps ? répliqua Véon. Might est mort, les Trois vaincus. Même si Ganon reste une menace, la situation du royaume du Mordz est bien meilleure que celle que l’on a connue depuis de nombreuses années. Une fois de plus Janus haussa les épaules et secoua la tête. - Crois-moi, bientôt il n’y aura pas pire situation que celle que vous allez vivre. On ira même jusqu’à regretter le temps où nous combattions Might. Et sur cette pessimiste tirade, Janus prit la porte et ne revint pas… Les jours puis les mois passèrent. Les attaques dans le pays s’étaient multipliées et Shadow Angel avait enfin consenti à envoyer l’armée pour y mettre un terme. Le château royal était presque sans défense en cas d’éventuelle attaque mais le risque était minime, la Capitale avait retrouvé une douce quiétude perdue depuis bien longtemps. Illyria avait fait appel aux meilleurs médecins, psychologues et drogués pour tenter de rendre la mémoire à Elvish. En vain. Elle commençait à désespérer et petit à petit son esprit se faisait à l’idée qu’ils ne pourraient jamais être heureux ensemble. Autre point noir sur le tableau, Janus n’était toujours pas réapparu. Lorsqu’il avait traité Elvish de moins que rien elle s’était laissée emporter par la colère et le chagrin. Elle avait proféré des menaces à l’encontre de son frère qu’elle n’aurait jamais eu l’idée de mettre vraiment en pratique. Pourtant, prenant ses paroles au pied de la lettre, son mystérieux frère et mentor s’était envolé dans la nature. Elle soupira et jeta un œil à l’extérieur. Par la fenêtre, elle pouvait voir les chantiers de reconstruction. Elle les avait lancés pour réparer les dommages qu’avait causé l’explosion du château de Might lors du Cataclysme. Depuis des années, personne n’avait jamais pensé que reconstruire était plus important que se battre et pourtant, alors même que tout semblait en harmonie et enfin à sa place, des soldats se battaient contre les mercenaires recrutés par Ganon quelque part dans la périphérie du pays. Diriger était dur. Prendre des décisions qui allaient condamner des soldats à une mort certaine était dur. Gérer ses problèmes familiaux et personnels l’était encore plus. La reine savait qu’elle avait des responsabilités envers son peuple et qu’il était de son devoir de les protéger contre les menaces éventuelles. Elle n’était pas sûre d’avoir les épaules faîtes pour cela, elle était perpétuellement en conflit intérieur avec elle-même. Elle était une guerrière, pas une politicienne. Les réunions et les conseils lui donnaient des nausées. Sa vie d’avant lui semblait beaucoup plus simple quand son seul souci était de faire respecter la justice sous l’autorité des Trois… Une année s’était écoulée depuis l’arrivée de Véon et des autres dans le monde futuriste du Mordz. La situation s’était nettement dégradée dans les dernières semaines passées comme l’avait prédit Janus. L’Armée du Soleil à Cinq Branches ne suffisait plus à protéger le territoire du Mordz et la panique s’était insinuée de plus en plus profondément dans le pays, ses relents aboutissant même jusqu’au cœur de la Capitale. Les mercenaires qu’avait engagés Ganon avaient désormais un nom. On les désignait généralement comme l’Escouade de la Mort car rien ne survivait à son passage. Dans cet agglomérat de troupes, on pouvait diviser l’armée en trois parties distinctes : la première était nommée Jugement en l’honneur de leur général, Zenight. La seconde était connue sous l’appellation de Pleine Lune pour la terrifiante Shaka. La dernière division était celle nommée Hina, commandée par le non moins terrifiant Ganon en personne. La nouvelle guerre qui s’annonçait avait déjà ravagé une bonne partie du Mordz et cela ne faisait qu’empirer. A l’heure où nous parlons, une bataille était justement en train de se dérouler : Shadow Angel avait mis un genou à terre. Du sang lui coulait sur tout le visage, l’empêchant de distinguer plus que quelques vagues formes floues. Il avait mal partout et du mal à respirer. Peut être la flèche qui dépassait de son omoplate avait-elle touchée un poumon ? Il avait l’impression de revivre la bataille de la colline contre l’Armée des Trois. Grelottant de tous ses membres, même respirer lui était intolérable. Il essaya de soulever son épée mais il se rendit compte qu’en lieu et place de sa main ne se trouvait plus qu’un moignon. Bizarre, il ne se souvenait plus qui la lui avait coupée pendant la bataille. Et il était trop fatigué pour hurler. Une silhouette se dressa devant lui. Il plissa les yeux pour distinguer les traits de son attaquant. Il le reconnut non pas à sa tête mais à la lame qu’il tenait dans sa main. Une lame contre laquelle il avait croisé le fer si souvent durant cette dernière année. - Tu vas me tuer, Ganon ? haleta-t-il avec peine. Son ennemi eut un ricanement méprisant. - Ne t’inquiète pas. Tu n’es que le premier, demain ta reine et tous tes amis seront morts également ! - Ca, ça m’étonnerait. - Qui vivra verra, éluda Ganon, ce qui n’est de toute façon pas ton cas. Et d’un coup de lame la tête de Shadow tomba. Ganon releva son épée couverte de sang et l’essuya avec un mouchoir. Cela faisait tellement longtemps ! Hina lui appartenait à nouveau. Il se sentait enfin fort, puissant, invincible. Complet. La lame lui conférait un pouvoir jusque là rarement égalé. Alors qu’il allait retourner se battre, il entendit des bruits de pas derrière lui. Une personne dont la présence le terrifiait se tenait tout prêt. Il ne laissa rien paraître de son malaise en continuant à lui tourner le dos. La personne s’arrêta à quelques mètres de distance et le silence que seuls les cris des soldats et les bruits des épées venaient briser s’installa. Enfin, après quelques secondes, la personne derrière Ganon se mit à parler : - Tu es loin d’être complet. Hina est comme un placebo, Ganon. Cette épée a déjà pris tout ce qu’il y avait d’humain en toi. Ta sensation de puissance est une illusion. Tu n’es pas immortel. Hina ne se sert que des âmes pures pour leur aspirer tout ce qui les défini comme humain. Pour les gens comme toi ou Zenight, elle n’a pas plus de valeur qu’une simple épée. Enfin, je devrais plutôt dire que pour Hina, tu n’as plus aucune valeur. Les doigts de Ganon se contractèrent un instant sur son épée. - Ne suis-je pas un Dieu ? Et cette épée est mon symbole ! - Ksss… Tu sembles oublier la leçon que Cort t’a apprise voilà bien longtemps. Celle où il est dit que même un Dieu peut saigner. L’homme fit une pause puis reprit : enfin, ce n’est pas le sujet. Je t’ai rejoint pour que nous puissions prendre le château de la reine, pas pour parler de ça. Rappelle tes troupes pour que nous soyons prêts dans quelques heures, demain sera le grand jour. La personne qui se tenait derrière Ganon se retira sur ces paroles, laissant le chef des bandits seul devant la tête décapitée du général de l’Armée du Soleil. Ses yeux s’abaissèrent sur elle et il la dévisagea un moment : - Tu as de la chance d’être mort, car ta reine souffrira mille fois plus que toi. Demain sera le jour de la fin de son royaume ! Tel serait effectivement le cas… |
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