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Lecture du chapitre 2 | |
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Nom de l'œuvre : Luna | Nom du chapitre : L'avenir, c'est maintenant. |
Écrit par Mirarus | Chapitre publié le : 11/6/2013 à 01:33 |
Œuvre lue 5912 fois | Dernière édition le : 11/6/2013 à 01:40 |
Il n'y a en ce monde qu'obscurité. La peur et la noirceur sont les seules unités existantes. Luna est là , au milieu de tout, au milieu de rien, au milieu du vide qu'emprunte son destin. L'angoisse la fait suffoquer, l'emprisonne, elle ne peut se mouvoir, pas plus qu'elle ne peut voir. Elle fermerait pourtant bien les yeux si elle le pouvait. Comme si au fond d'elle, des yeux d'ébènes étaient ouverts sur la tristesse de cet endroit. Elle se sent comme chez elle et à la foi loin, comme perdue dans les méandres d'un labyrinthe sans sortie. Elle sent qu'un brouillard effleure sa peau, ses cheveux, son âme. Bien des choses invisibles sont pourtant de grandes meurtrières. La mélancolie est une mer peu agitée cependant très profonde, y perdre pied, c'est s'y noyer, indubitablement. Au loin, Luna sent une présence, une intrusion, non..pas une intrusion, un revenant, comme une chaleureuse sensation de retour chez soi. Peu à peu, l'horizon s'éclaircit, la mer s'agite, le sable devient chaud sous ses pieds. Le rien disparaît. Le ciel apparaît, parsemé de nuages menaçants. Luna se sent pourtant enfin sereine. La présence est rassurante, même si cette présence fait la grimace à la nôtre. L'absence était lourde jusqu'ici, bien qu'elle ne disait rien. Luna sent qu'elle s'échappe, peu à peu. Elle tente de s'approcher de l'eau, sans succès. Ses chevilles sont enchaînées. Elle agite les bras, se meut tant qu'elle le peut, mais rien, elle ne peut avancer. Luna hurle, pleure, s'accroupit de desespoir puis s'arrache les cheveux. Ses ongles s'enfoncent dans son crâne meurtri par la violence de sa détresse. La brume onirique se lève. Luna n'ose pas se lever, elle s'asseoit, les genoux contre sa poitrine, les mains se dirigeant vers son visage, le soutenant fermement. Serrant le plus fort possible, comme si ses doigts furent des crochets l'empêchant de perdre la tête, de perdre pied dans la mer de larmes salées qui s'imprégnaient peu à peu dans draps. Un son irritant et lourd se fait entendre, Luna connaît bien ce bruit, quelqu'un se presse à l'étage. Probablement la patronne.. La porte s'ouvre. " Il serait temps que tu songes à te lever et à faire tes corvées jeune paresseuse, je ne te paie pas à ne rien faire. Au boulot petite sotte avant que je ne me fâche, le coq a hurlé depuis bien trois heures ! Je suis patiente car aujourd'hui un client a proposé de payer un sacré prix pour t'avoir une journée, mais je ne te laisserai pas paresser une seconde de plus ! Prépare-toi en vitesse puis va t'occuper du ménage ! - Le coq n'a qu'à crier plus fort. A lui, on lui autorise d'être enrhumé, il faut croire.. - Ne réponds pas ! Tu es dans une bien trop mauvaise position pour te le permettre. Dois-je te rappeler que ta tête vaut une petite fortune ? Séparée de ton corps. - Il est vrai que, chez vous, la mort vaut plus que la vie. Et pourtant la viande n'a aucune valeur une fois que les larves s'en repaissent.. Certes, mes mots vous gênent, mais vos menaces, elles, n'ont aucun effet sur moi, je ne crains pas plus la mort que votre langue de vipère. C'est ainsi, vous ne posséderez jamais plus que mon corps, répond Luna avec toute l'indifférence possible en ce monde. -Alors que ce beau minois se pare de bleu, il sied à tes yeux ! " Sur ces mots, la patronne la gifle violemment. Sa patience s'envole aussi vite que ses doigts. Luna le sait, elle n'en a que trop souvent fait les frais, en toute indifférence. "Enfile une robe et va travailler, tout de suite, tu te feras belle quand j'en déciderai, et tu seras privée de dîner ! -Soit, madame." La patronne sort brutalement de la chambre, comme toujours, le visage rouge de colère. Luna prend la première robe qui vient, si l'on peut appeler le chiffon qu'elle enfile comme telle. Elle ne se coiffe pas, ne se parfume pas. A quoi bon ? Une deuxième gifle et elle ne serait plus présentable. Elle se presse vers l'étage inférieur. Les objets dont elle a besoin s'y trouvent. Elle les saisit, remplit un seau d'eau pour l'exposer à la chaleur solaire derrière le bâtiment. De l'herbe s'y étend à perte de vue, c'est un bel endroit que Luna aime et dans lequel elle se sent relativement bien malgré la patronne qui se donne comme défi personnel et quotidien de lui pourrir la vie, en vain bien entendu. Les épreuves ont rendu Luna insensible. Elle n'est qu'une coquille vide depuis bien longtemps. Dotée d'un caractère irritant et d'une grande intelligence, elle est la seule à tenir tête à sa patronne. Elle ne connaît pas la crainte. Tout en travaillant, elle imagine sa vie dans un autre monde, entourée d'autres gens. Son esprit vole toujours au loin, elle le perd parfois. Elle s'émerveille devant les plus minuscules des événements, les battements des ailes d'un oiseau, les vibrations de la queue d'un chien, le travail des endurantes fourmis. Elle observe ce microcosme qui l'entoure et le vit quand elle ferme les yeux. C'est dans ces moments-là qu'on l'interrompt dans son travail et ce jour-ci ne fait pas exception à la règle. Sa rêverie retourne dans son imaginaire et elle subit un retentissant : "Le client est là , viens vite ! - J'arrive," soupire-t-elle. Elle range balai, serpillères, seau, etc. Elle part vite se préparer, comme à l'accoutumée. Un client ne gaspille pas son argent pour un laideron, elle le sait. Elle coiffe ses cheveux, ce qui n'est pas une mince affaire quand on voit leur longueur. Arrivant au niveau de ses reins, la blanche chevelure de Luna est son plus grand défi chaque jour. Longue, se finissant en anglaises, composée de cheveux si fins qu'on ne les distingue pas quand ils tombent sur le plancher. Une fois coiffée, Luna se poudre le visage, unifiant un teint très clair, à la limite du teint cadavérique caractérisant les gens qui n'aiment pas le soleil. Elle se noircit les cils à l'aide d'une poudre de charbon puis rougit ses lèvres. L'étude des plantes permet bien des miracles. Enfin prête, elle prévient la patronne. Cette dernière envoie l'homme dans la chambre qu'elle ouvre sans frapper, comme toujours. "Luna, voici Tristan, ton client de la journée. Tristan, voici Luna, la plus belle fille de la maison, pour vous servir, bonne journée à vous. - Merci bien", dit-il en fermant la porte au nez de la vieille femme. L'homme s'approche de Luna, saisit la chaise sur laquelle elle se prépare habituellement, la tourne en direction du lit, s'assied face à elle puis s'exprima d'un air grave : "Jeune fille, je vais te sortir de là . - .. -Tu peux parler, je ne vais rien te faire, je n'ai pas l'intention de te toucher. -Sâchez monsieur, que vous êtes bien prétentieux, lance Luna. -Sâche, jeune demoiselle, que ce n'est pas la fierté qui me fait dire ces mots. -Bien. Trève de bavardages, je veux de l'action. -Tu essaies de me défier, regarde donc ça." L'homme sort un poignard étincelant, d'une couleur argent, si magnifique qu'il contrastait avec le pathétique manteau de cuir usé par les années duquel il sortait. "Vois que je ne plaisante pas. Donne moi deux informations : Où se situe la chambre de ta patronne ? Sais-tu te servir d'une arme ? -Elle se repose dans une chambre à l'étage inférieur dont la porte est usée, comme toutes les chambres de cette bâtisse. Mais vous avez de la chance, il n'y a qu'une chambre à l'étage inférieur, vous ne pourrez pas vous tromper. Quant à votre deuxième question, il n'est pas question de savoir se servir d'une arme mais de le vouloir, et je le veux. -Bien, jeune fille, je reviens d'ici dix minutes, prépare des affaires pour voyager, oublie ton parfum et tout ton attirail, on voyage le plus léger possible. Seuls des vêtements simples mais chauds, de quoi dormir et de la nourriture seront utiles. Sers-toi du sac que je pose sur ton lit," dit l'homme en fermant la porte pour la deuxième fois. Luna prend immédiatemment les quelques affaires confortables qu'elle possède pour les mettre dans le sac en cuir de l'homme. Elle décide de s'aventurer jusqu'à la cuisine pour y dérober quelques pommes, du pain, et des morceaux de viande séchée. Assez rapidement pour revenir avant l'homme sans se faire repérer. L'homme revient dans la chambre deux minutes après elle, faisant face à une jeune fille méconnaissable, vêtue d'une robe noire, simple, à manches assez larges pour bouger les bras sans encombre, rapiécée un peu partout, modifiée par Luna elle-même, sans aucun doute, un sac à la main, les cheveux décoiffés par quelques péripéties dont il n'a visiblement pas été témoin, le visage propre et sans artifice. Il se dit que Luna était prête à s'en aller depuis très longtemps finalement. "Qu'avez-vous fait ? -J'ai égorgé la Reine et nous devrions nous en aller avant que les ouvrières rappliquent !, repond-t-il avec une pointe d'angoisse dans la voix. -Ai-je seulement accepté de venir avec vous ? -T'en as l'air, et dans le cas contraire, je ne te laisse pas le choix ! ajoute-t-il en y mettant le ton le plus autoritaire qu'il a dans son repertoire émotionel. -Comme si j'allais refuser de quitter ce trou à rat.. Bien monsieur, allons-y, je vous attends", finit Luna. En quittant l'endroit, Luna ne se retourne pas, elle s'approche enfin du bord de la mer, elle ne voit plus aucune chaîne à ses pieds, l'horizon se montre chaleureux, elle avance enfin. |
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