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Lecture d'un chapitre
| Lecture du chapitre 3 | |
|---|---|
| Nom de l'œuvre : Luna | Nom du chapitre : Connue comme la Louve Blanche. |
| Écrit par Mirarus | Chapitre publié le : 11/6/2013 à 21:03 |
| Œuvre lue 5913 fois | Dernière édition le : 11/6/2013 à 21:05 |
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| Luna est partie depuis maintenant six heures. Six heures qui la séparent de son ancienne vie et qui la rapprochent petit à petit de son humanité. Elle saisit chaque détail pour le garder en mémoire, se prenant d'une folle passion pour la faune et la flore qu'elle traverse. L'homme qui l'accompagne se trouve souvent étonné au contact de la jeune fille. Tantôt, sa naïveté le fait sourire, tantôt sa lucidité lui coupe le souffle. Plusieurs fois pendant leur voyage, il l'a surprise les mains prêtes à effleurer des plantes mortelles, les saisissant à la volée pour lui éviter une mort lente et douloureuse. Et plusieurs fois pendant le voyage, les stratégies dont elle comptait user pour chasser leur repas n'ont pas manqué de lui faire ressentir quelque admiration pour elle. Ils traversent ensemble le bois aux loups, sur leur garde, pour ne pas finir en rondelles. Ce n'est pas tant l'animal qui y vit qui les effraye, mais les individus qui aiment généralement s'y balader, notamment des mercenaires se dirigeant dans la prochaine ville afin de rapporter la tête de leur proie. Luna n'en a jamais croisé mais Tristan lui a expliqué qu'ils pouvaient être extrêmement dangereux, et qu'il préférait donc croiser le moins de monde possible car on ne sait jamais quel prédateur se cache derrière chaque Homme. Arrivés à l'orée du bois, ils décident de s'y arrêter et d'y faire une pause pour la nuit, afin de ne pas dormir à ciel ouvert, ils seraient trop facilement repérables. Tristan établit leur camp, ne préparant pas de feu malgré la nuit fraîche qui s'annonce, mieux vaut avoir froid que de se faire couper la tête pendant son sommeil. Luna prépare sa couche, composée des quelques draps surannés dont elle disposait dans sa chambre, sans même se demander si le sommeil viendrait aussi vite que dans un lit plus confortable. Cependant elle se sent rassurée et décide même d'en demander plus à l'homme qui l'a fait sortir d'où elle était. "Pour quelle raison m'avez-vous fait sortir de là ? Et surtout, comment se fait-il que vous me connaissiez ?, lui demande-t-elle. - Jeune fille, personne ne devrait être enfermé contre son gré pour le bonheur de personnes sans morale. Et, tu es plus connue que tu le penses. Ton physique atypique qui attirait les clients, il t'a aussi permis de te faire apprécier de gens qui ne te connaissent pas que tu ne connais pas. Quand un mouton naît avec deux têtes, tout le monde aimerait admirer cette étrangeté de la nature. Les gens en parlent autour d'eux, une foule se crée pour ce simple détail. Tu n'as peut-être pas deux têtes mais tu as les cheveux blancs. A ton âge c'est une chose étrange, suffisamment étrange pour que les gens en parlent, notamment ceux qui ont visité ta chambre et constaté la véracité de la rumeur. -Vous êtes en train de me dire que, jusque parce que j'ai les cheveux blancs, tout le monde parle de moi ? C'est insensé.. Vous êtes insensé, dit Luna en souriant de l'absurdité des propos de l'homme. -Si je te dis que seule la famille royale de l'ancien temps possédait cette chevelure, me dirais-tu qu'il est insensé pour un peuple tyrannisé d'y voir quelque espoir ? -Tyrannisé ? Mais ce pays, ses habitants ont toujours été traités de la manière la plus juste qui soit. Que me dites-vous là ? Et puis, en quoi un symbole de royauté pourrait les rasséréner ? -Cela fait des années que la justice n'existe plus.. Le nouveau Roi a pris soin d'imposer son pouvoir le plus brutalement possible, profitant du peuple autant qu'il l'a pu. Il est logique qu'un signe rappelant le bonheur dans lequel les gens vivaient auparavant les rendent hystériques d'une certaine manière. Qui est l'insensé ici ? Moi qui comprends ces gens ou toi qui ne sais même pas que tu possèdes la même chevelure que la famille royale qui a tant chéri ce pays avant le malheur qui lui est tombé dessus ? -Votre raisonnement se tient après tout.., reconnaît-elle. -Evidemment, comment aurais-je été au courant de ton existence autrement ? -Vous êtes venu me chercher, mais rien n'explique pourquoi vous l'avez fait. Juste comment vous avez pu le faire. Vous n'avez pas libéré les autres filles, seulement moi. Alors répondez-moi sans tourner autour du pot, pour quelle raison m'avoir fait sortir de là ? -J'ai tué la patronne, je leur ai laissé une chance de s'échapper. Et pour te répondre, la vérité est que ma femme est enfermé dans une prison miteuse pour avoir volé du pain et quelques fruits sur un marché. Vois donc comme la justice est belle. Elle est enceinte et risque de ne pas tenir longtemps, sous-alimentée dans un endroit sale et humide, rien de mieux pour perdre son enfant.. -Ca ne m'étonne pas vraiment finalement. Ce monde a tourné dans le mauvais sens.. -Je dois payer une caution pour la libérer mais elle est bien trop élevée pour moi. Alors j'essaye de gagner le plus d'argent possible pour enfin la retrouver. Enfin, n'en parlons plus et dormons maintenant", finit-il. Tout ceci donne matière à réflexion à Luna qui trouve difficilement le sommeil. Elle pense à la femme de Tristan, enfermée dans un lieu sombre et angoissant, dans un lieu lui rappelant son cauchemar de la nuit passée, les pieds enchaînés. Ce monde avait-il tant changé ? Et qu'adviendrait-il de cet enfant s'il naissait en un lieu clos et putride ? Luna se promet que cette nuit, elle trouvera une solution pour sauver cette femme et son enfant. C'est ainsi qu'elle se met à réfléchir à la composition d'une prison, elle en avait visité étant petite mais ses souvenirs restent vagues. Et puis, tout avait peut-être bien changé depuis cette époque.. mais elle ne renoncera pas ! C'est à son tour de venir en aide à Tristan. Demain, elle lui parlera de ce qu'elle envisage de faire, espérant le convaincre malgré la dangerosité du plan qu'elle imagine. Les rayons du soleil passant entre les branches des arbres lui effleurent doucement la peau. Les chants des oiseaux de la forêt la sortent petit à petit de son sommeil sans rêve. Luna ouvre les yeux, la magnificence du ciel, la pureté de son bleu lui caressent le coeur. Ses pupilles se rétractent, dévoilant ses prunelles azurées. Elle émerge en douceur, pour la première fois depuis très longtemps. Aucun coq dans les parages, pas plus qu'une vieille femme cupide pour lui faire subir sa tyrannie. Elle se lève délicatement, avec toute la grâce dont sa jeune âme peut faire preuve. Tristan n'est pas là . Ses affaires sont réparties ça et là . Luna suppose qu'il est allée chasser de quoi manger. L'attendre est la meilleure solution, cependant elle est pressée de découvrir la forêt au petit jour. Elle se couvre avec un de ses draps vieillots et marche entre les racines des grands arbres dont la cime semble atteindre le ciel. L'air est frais mais lui soulage les poumons, comme si elle n'avait jamais vraiment respiré jusqu'à aujourd'hui. La rosée jonchant le sol lui rafraîchit les pieds à travers le cuir de ses souliers. Des écureuils effectuent des acrobaties d'arbre en arbre, émerveillant la jeune fille. L'un deux égare un gland lors d'un saut un peu trop périlleux. Luna rit. Elle ne voit pas le temps passée, sa petite promenade en devient une grande, et au bout d'un chemin, elle croise Tristan qui tient deux lapins par les oreilles de sa main droite. "C'est l'heure de manger je présume ? -Futée la demoiselle." Ils retrouvent vite l'endroit où ils ont entassé leurs affaires. Tristan fait un feu pour faire cuire la viande. Le feu est moins repérable de jour. Tristan dit calmement : "Nous sommes bientôt arrivés. -Ah oui ? Et où allons-nous exactement ? Bien que je ne connaisse pas vraiment le coin. -Nous allons dans le domaine d'un noble qui se situe à une vingtaine de kilomètres d'ici. -Mais pour quoi faire ? Comment se fait-il que vous alliez chez un noble d'ailleurs ?, s'étonne Luna. -Je ne mérite pas de parler à des gens de meilleure condition, c'est cela ?, se vexe Tristan. -Ce n'est pas habituel, c'est tout, explique la jeune fille. -Bien entendu, tu connais les us et coutumes des nobles toi ? -Oui, je les connais très bien même. Mais, soit. Passons, je voulais vous parler d'une chose plus importante. J'ai réfléchi toute la nuit sur votre condition et celle de votre femme. Ca m'attriste d'imaginer le désespoir dans lequel vous vivez tous deux. J'ai imaginé une manière de libérer votre femme. Je suis prête à vous y aider, alors si vous le voulez bien, permettez-moi de vous rejoindre dans un voyage qui nous conduira à la prison dans laquelle on l'a enfermée et de briser les chaînes qui la maintiennent esclave de la souffrance, confie-t-elle sincèrement à Tristan. -Tu..tu n'y penses pas. Tu t'imagines que je n'ai pas moi-même cherché à la libérer ? Et si on y arrive, tu crois quoi ? Que tout ira pour le mieux dans le meilleur des mondes ? Ne sois pas naïve, je ne veux pas imposer une vie de fugitif à ma famille. Ma pauvre femme.. Tu crois qu'il est facile d'agir contre la loi ? Il n'y a rien de plus inhumain qu'une loi, sâche-le ! Ca ne pense pas, ça n'a pas de sentiment, ça s'applique simplement. Encore y aurait-il des juges pour faire preuve de l'humanité dûe pour comprendre chaque situation, mais même ça nous n'en avons plus ! Le vol d'un morceau de pain comme le vol d'une cariole conduit à l'emprisonnement à vie. Aucun être humain pour doser la gravité des choses, le roi actuel considère que ce n'est qu'une perte de temps et d'argent et qu'un individu "dégénéré" le restera forcément !, lance Tristan d'une voix énergique mais tremblante. -Si le roi ne veut pas gaspiller d'argent pour le peuple, pensez-vous qu'il en gâcherait pour qu'on vous coure après ? Plus sérieusement, vivre dans le souvenir triste et éternel de votre femme serait plus facile que la mort ? Il n'y a pas plus lâche que de fuir les problèmes en mourant, alors faites donc la plus lâche et simple des choses, appelez donc votre mort s'il le faut, mais au moins tentez le coup ! Votre femme sera toujours en prison d'après ce que vous me dites. Vous ne pouvez craindre la mort dans une telle situation, soit vous vivez dans le désespoir, soit vous mourrez une bonne fois pour toutes. Et dans le cas où vous réussissez à la sauver, le pays est immense, et changer d'apparence est très simple. Puis soyez réaliste, une femme enceinte en prison, je suis navrée de le dire si brutalement mais elle n'en a plus pour très longtemps. Alors soit vous écoutez mon plan et on la sauve et vous avec, soit vous restez borné à des convictions absurdes, à des excuses donc. -Tu n'as pas tort.. Seulement, comment comptes-tu défier les gardes, atteindre la cellule où ma femme est enfermée, et t'enfuir ? C'est impossible !, s'exclame Tristan désespéré. -Les hommes, enfin les hommes disons "simples d'esprit" comme les gardes d'une prison, par exemple aiment deux choses : l'alcool et les femmes. Donnons leur ces deux choses, et nous pourrons entrer. -C'est totalement fou.. Crois-tu que des gardes se laisseraient berner alors que leur travail est d'une importance capitale ? -Croyez-vous qu'ils ont conscience que leur travail est important ? Sâchez que ce genre d'individus n'est pas très bien payé, alors c'est impossible qu'ils acceptent cela en connaissance de cause. S'ils le savaient, ils demanderaient plus ou s'en iraient, ils gagneraient bien plus dans d'autres fonctions où seuls leurs muscles sont sollicités. Là , ils doivent et être lucide et se servir de leur force. Il suffit de leur apporter le fruit défendu, et ils obtiendront la connaissance. Du vin, des femmes. Vous vous déguiserez, moi je n'en ai pas besoin évidemment. Nous les convaincrons de boire, une fois qu'ils commenceront à devenir saouls, nous leur demanderons de nous faire visiter leur manoir et de les récompenser tendrement. Ils ne pourront refuser face à une offre si alléchante, une fois à l'intérieur, nous leur demanderons les raisons pour lesquelles telle ou telle individu est ici, à force nous trouverons bien une femme enceinte, vous ne croyez pas ? -Ca me paraît farfelu.. mais possible. Je me dois d'être sincère avec toi, le noble vers lequel nous nous dirigions, il m'a envoyé te chercher, ayant entendu parler de toi, de ta beauté et de tes cheveux d'un blanc royal, il voulait me récompenser en échange de toi. Je voulais libérer ma femme grâce à cette récompense. Je suis venue te chercher uniquement pour te vendre, tu aurais fini comme poupée de compagnie d'un jeune noble prétentieux. Mais, finalement, je ne peux m'y résoudre, tu ne mérites pas de connaître le sort de ma femme. Alors je vais accepter de faire comme tu as dit. Allons libérer ma femme jeune fille ! J'ai hâte de te la présenter." A ces mots, Luna sourit. Tristan a décidé d'être sincère, et c'est tout ce qui importe. Ses motivations étaient nobles. |
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